Élections générales : les prémisses de scrutins tronqués ?

Des inquiétudes planent autour de la sincérité des scrutins © Dépêches

Libreville, le 14 février 2023 (Dépêches 241). Cette année 2023 sera marquée au Gabon par l’organisation des élections présidentielles, législatives et locales. Si le Président de république a donné hier, le coup d’envoi d’une concertation visant à définir les bases de la préparation de scrutins aux lendemains apaisés, il n’en demeure pas moins que certains signaux laissent pessimistes plusieurs observateurs avertis de la vie politique.

« L’histoire bégaie » a-t-on coutume de dire. 1993, 1998, 2005, 2009 et plus récemment 2016. Le scénario a souvent été le même à l’issue des élections présidentielles. Des crises postélectorales caractérisées par des fortes contestations, parfois réprimées dans le sang, avec de nombreux morts à la clé. À la veille des élections générales prévues cette année 2023, c’est donc dans l’optique de réfuter cette fatalité, que le Président de république a lancé hier au Palais Rénovation, les travaux de la concertation nationale réclamée depuis de nombreux mois par l’opposition, à l’effet de mener une réflexion visant à poser les fondements de scrutins aux lendemains désormais apaisés. 

Seul hic, en dépit des discours et de la bonne foi apparente d’Ali Bongo, plusieurs observateurs croient percevoir en certains signaux, les prémisses de scrutins tronqués. D’abord, ils relèvent l’élection de Michel Stéphane Bonda, cadre du Parti Démocratique Gabonais, ancien conseiller d’Ali Bongo et ministre jusqu’à un passé récent, à la tête du Centre Gabonais des élections, le tout en violation du code électoral, lequel en son article 12 alinéa 7 nous enseigne pourtant que « Peuvent faire acte de candidature à la fonction de Président du Centre Gabonais des Élections, les hauts cadres de la Nation reconnus pour leur compétence, leur probité, leur intégrité morale, leur honnêteté intellectuelle, leur neutralité et leur impartialité »

Autre motif d’inquiétude, l’absence de la mission d’observation électorale de l’Union européenne, qui n’a pas été saisie par le gouvernement gabonais. Ceci certainement parce que lors des élections présidentielles de 2016, elle n’avait pas hésité à pointer le « manque de transparence » et à dénoncer les nombreuses irrégularités qui ont émaillé le processus électoral. De quoi laisser prospérer dans l’opinion publique, l’idée que certains acteurs souhaiteraient organiser la fraude à l’abri des regards indiscrets.

À cela s’ajoute, le fait que les décisions de la concertation politique qui a débuté hier, ne seront pas exécutoires. Autrement dit, les conclusions et les résolutions qui sortiront de cette rencontre seront adoptées de façon discrétionnaire par le Président de la république, lequel aura le libre choix de rejeter les réformes à même de favoriser l’installation d’une véritable démocratie, assise sur le principe de l’alternance politique, comme le préconise le philosophe Karl Popper dans son ouvrage intitulé La Société ouverte et ses ennemis. 

Des arguments qui finalement font écho aux déclarations d’Alain Claude Bilié-By-Nze, lequel en réponse au député Séraphin Akure-Davain lors de son discours de politique générale, avait affirmé avec force « Le Parti Démocratique Gabonais n’est pas prêt à vous laisser le pouvoir ». Une approche corrélée par ses propos récents tenus dans un meeting organisé par Eloi Nzondo. L’ancien porte-parole sans cligner des yeux a ainsi déclaré « être prêt à aller au feu pour la réélection d’Ali Bongo Ondimba ». 

Des déclarations fortes de sens qui ne laissent que très peu de doute sur la volonté manifeste des «Alilistes» de conserver le pouvoir. Si les précédentes élections ont été émaillées de profondes irrégularités, par quelle extraordinaire voudraient-ils s’en départir en 2023 ? Dès lors, se demander si tous ces faits sont les prémisses d’une élection tronquée n’est ni plus ni moins qu’une question oratoire. 

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