Indépendance An 62: Ali Bongo, autopsie d’un diagnostic erroné

Le président de la république a pondu un discours éloigné des réalités et qui n’augure rien de bon sur la teneur et le sérieux des réformes qui doivent être engagées pour le Gabon © DR

Libreville, le 23 août 2022-(Dépêches 241). À un an de la présidentielle, Ali Bongo tente de défendre son bilan. Un bilan manifestement décalé de la réalité, que le chef de l’État a  pourtant et étrangement défendu avec fierté lors de son adresse à la nation le 16 août dernier, à la faveur des festivités marquant les 62 ans d’indépendance de notre pays. Un bilan qui, surtout, consacre que le chef de l’Etat n’est pas exactement au fait des maux qui minent son pays. Un diagnostic clairement erroné, et dont le traitement, sans grande surprise, n’aura aucun effet véritable sur le développement du Gabon. 

L’heure est au bilan. Ce d’autant que moins d’un an nous sépare de la future élection présidentielle prévue en 2023. D’ailleurs, le chef de l’État ne fait plus mystère de ses « grandes ambitions ». En effet, le 16 août 2022, Ali Bongo a réussi à rassembler quelques milliers de téléspectateurs à l’occasion de son traditionnel discours, veille de la célébration des 62 ans d’indépendance de notre pays. 

Clairement, en plus d’une kyrielle de nouvelles promesses, le chef de l’État a tenté de défendre ses 13 ans de magistère. Un bilan que le fils d’Omar Bongo défend non sans une once de fierté. « Je ressens une certaine fierté. Cette fierté, je la tire du travail accompli. Car en l’espace de treize ans, notre pays a énormément progressé », a-t-il déclaré. Cette phrase à elle seule est la preuve manifeste du regard inconséquent que jette le président de la République sur le Gabon. Car nombreux sont les Gabonais qui cherchent « l’énorme progrès du Gabon » évoqué par Ali Bongo Ondimba. 

Entre Autosatisfaction et démagogie 

En 13 ans, le Gabon n’a pas construit une seule université, l’UOB, est en totale déliquescence, les hôpitaux du Gabon sont des mouroirs, où en plus, des dépouilles sont confisquées. Les plateaux techniques inexistants. En 13 ans, le gouvernement a réussi l’exploit de mettre à genou la Caisse nationale de sécurité sociale, véritable fleuron de la politique sociale du pays. Résultats des retraités à la peine, qui ne perçoivent pas leurs pensions et qui sont gazés et violentés, lorsque légitimement ils réclament leur dû. 

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En 13 ans, le Gabon s’est montré incapable de construire une route praticable sur la National 1. Plusieurs localités dans l’hinterland sont difficilement accessibles du fait du mauvais état du réseau routier en dépit des milliards décaissés. Le chômage est endémique, la délinquance a explosé et la pauvreté s’est paupérisée. On oubliera pas la réalité d’un système gangrené par la corruption, l’abus de pouvoir, les disputes, le trafic d’influence, l’opacité dans la gestion des affaires publiques pour ne pas noircir davantage un tableau déjà assombri par la gestion calamiteuse d’un pouvoir manifestement incapable. 

Changement de stratégie.  À défaut de promettre la création de nouveaux emplois,  le chef de l’État ambitionne cette fois de créer plus de 100.000 auto-entrepreneurs. Sauf que  la promotion de l’entreprenariat n’est pas un fait nouveau chez Ali Bongo. On se souvient encore du « Grand Prix de l’Excellence Ali Bongo Ondimba » lancé en 2014. Sans surprise, ce projet n’a pas survécu et l’on ne risque pas de se tromper en affirmant qu’il visait plus à séduire la jeunesse en vue de la présidentielle 2016, qu’a créer une véritable classe d’entrepreneurs dans notre pays.  Une stratégie efficace dans un pays où le chômage des jeunes est devenu endémique.  Le  projet « un jeune un metier » fabriqué à quelques mois de la présidentielle 2016 en est une parfaite illustration. 

Ode aux promesses de Gascon 

Une autre annonce qui frôle l’indécence est celle liée à l’éducation. « Dès la rentrée prochaine, ce sont 10.000 nouvelles places au primaire et au secondaire qui seront disponibles dans le pays ». Que représentent en réalité  10.000 places ? Sommes-nous réduits à endosser un bilan sur le nombre de places mises à la disposition des élèves ? En 13 ans, combien d’école ont été construites ? Ce grand flou savamment entretenu par les communicants du palais du bord de mer trahit manifestement l’échec de notre pays dans un secteur prioritaire qu’est l’éducation.  Pour rappel, dans le Plan stratégique Gabon émergent dont l’échéance est prévue en 2025, le Gabon s’est fixé pour objectif de construire 4000 salles de classe avant fin  2023. 

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Par ailleurs, le président de la République a également évoqué la sempiternelle question de réhabilitation des voiries urbaines, en particulier dans le Grand Libreville.   « Cette année, ce sont plus de 20 km de routes qui ont été réhabilités. D’ici août 2023, une enveloppe de plus de 50 milliards permettra la réalisation de nouveaux tronçons aussi bien dans le Grand Libreville que dans les agglomérations de l’intérieur du pays. » Une annonce qui a de quoi surprendre lorsqu’on sait que plusieurs chantiers routiers en cours dans le Grand Libreville peinent à être livrés faute de paiement de la part de l’État.  C’est le cas  du Boulevard Triomphal, confié à l’entreprise Socoba, apprend-on de notre confrère Reflets Gabon.  Ce  tronçon de 3 km devait être livré en novembre 2021. À cette allure, le gouvernement parviendra-t-il à livrer 85 km de routes bitumées dans la Grand Libreville en 2023 tel mentionné dans le  PAT ?

Le seul  haut fait de ce discours du chef de l’État est sans doute ce mea culpa :  « Je dois à la vérité de dire que mon propre gouvernement a, par le passé, fait des promesses que nous n’avons pas toujours été en mesure de tenir. Des projets ont été commencés et jamais terminés. », a-t-il reconnu.

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