
Libreville, le 28 avril 2025 – (Dépêches 241). Le recours annoncé du Gabon à une diversité de bailleurs en 2025, que ce soit la Banque Mondiale, Standard Chartered, Deutsche Bank, ou encore la BADEA, reflète une volonté d’élargir les sources de financement. En apparence, cette stratégie réduit la dépendance excessive à un partenaire unique. Mais en réalité, elle soulève des défis importants en matière de cohérence financière et de suivi de la dette.
Cette pluralité de créanciers, avec des modalités variées, complexifie beaucoup plus la gestion du portefeuille. Chaque bailleur impose ses propres conditions, calendriers de remboursement, et exigences de conformité. Pour un État dont la capacité administrative reste limitée, cette diversification pourrait rapidement se transformer en dispersion, voire en désorganisation stratégique.
L’enjeu est d’autant plus critique que le Gabon ne semble pas se doter d’une véritable stratégie d’optimisation de ses financements. Les choix ne paraissent pas toujours guidés par des critères de soutenabilité ou de rendement économique des projets. Dans ce contexte, la tentation d’emprunter selon les opportunités ponctuelles prime parfois sur une planification rigoureuse à long terme. On peut le voir avec la souscription prochaine d’un eurobond de 370 milliards de FCFA malgré un contexte tendu.
Par ailleurs, une politique de diversification ne peut être efficace que si elle repose sur une logique de transparence, de contrôle des résultats et de hiérarchisation des priorités. Le Gabon doit éviter le piège d’une dette éclatée, mal pilotée, qui finirait par augmenter les risques au lieu de les diluer. La maîtrise de la dette commence par une cohérence stratégique. Ce que devrait savoir la direction générale de la dette.
À cela s’ajoute la question de la soutenabilité macroéconomique. En multipliant les sources d’emprunts, le pays risque d’accroître le service de la dette à court terme, au détriment des dépenses productives. Sans une évaluation stricte de la capacité de remboursement à moyen et long terme, le Gabon pourrait voir son espace budgétaire se contracter, fragilisant sa marge de manœuvre pour répondre aux chocs économiques ou climatiques.
À noter que cette dispersion des créanciers appelle une réforme urgente de la gouvernance de la dette publique. Il devient impératif de renforcer les capacités techniques de la direction de la dette, d’instaurer un système intégré de suivi et d’évaluation des emprunts, et d’assurer une coordination accrue avec le ministère de l’Économie, le Trésor et la présidence. Sans cela, la diversification pourrait bien devenir un facteur de vulnérabilité accrue pour les finances publiques.