
Libreville, le 7 Mai 2025 – (Dépêches 241). Le communiqué publié hier par la direction générale du groupe BGFIBank, visant à rassurer l’ensemble de sa clientèle sur le maintien de Henri-Claude Oyima au poste de président-directeur général du groupe, alors même que ce dernier vient d’être nommé ministre de l’Économie, des Finances, de la Dette et des Participations, suscite de vives préoccupations au sein de l’opinion publique nationale. Cette situation soulève en effet un grave conflit d’intérêt et pose un problème d’incompatibilité juridique évident. Dans ce contexte, il apparaît indispensable que le nouveau ministre fasse un choix clair entre ses fonctions publiques et ses responsabilités privées, sous peine de faire entrer la Ve République dans un véritable scandale aux antipodes du renouveau institutionnel prôné par Brice Clotaire Oligui Nguema.
Alors qu’il fait son entrée au sein d’une équipe gouvernementale pour la première fois, la nomination d’Henri-Claude Oyima à la tête de ce ministère stratégique est déjà au cœur d’une vive controverse. En cause : un communiqué de la direction générale du groupe BGFIBank, qu’il dirige depuis plusieurs décennies, dans lequel la direction générale le félicite pour sa nomination tout en confirmant son maintien au poste de PDG. Ce communiqué, adressé à la clientèle, précise : « À cet effet, nous tenons à vous rassurer que les activités du Groupe BGFIBank restent sous la supervision du Président Directeur Général. » Une telle déclaration, qu’elle soit volontaire ou non, ouvre la voie à un conflit d’intérêts qui aurait pu être neutralisé par la désignation d’un intérimaire, comme l’exigent l’éthique de bonne gouvernance et les lois de la République.
Par ailleurs, une certaine opinion soutient qu’étant donné que les établissements bancaires relèvent directement de la tutelle du ministère de l’Économie et des Finances, il est inacceptable que le ministre chargé de ce portefeuille soit également PDG d’une structure relevant de sa propre autorité. Car, cette double fonction du PDG du groupe BGFIBank constitue non seulement une violation des textes en vigueur, mais révèle aussi un conflit d’intérêts flagrant en matière de bonne gouvernance, de morale et d’éthique, principes fondamentaux censés guider l’action de cette nouvelle République.
Sans aucune forme de procès d’intention, en tant que ministre en charge des finances, monsieur Oyiba pourrait, de manière directe ou indirecte, interférer dans les mécanismes de régulation économique et fiscale du pays. Il aurait potentiellement accès à des informations sensibles concernant toutes les entreprises opérant sur le territoire national, y compris les concurrentes de son groupe bancaire. Il lui suffirait donc qu’il ait accès à ces données pour que cela constitue un avantage déloyal, déséquilibrant le jeu de la concurrence dans le secteur bancaire.
LIRE AUSSI: Gabon: entrée d’Henri-Claude Oyima au Gouvernement bardé de plus de 3 portefeuilles ministériels
Il est donc à craindre que la Ve République, à peine entamée, débute sous de mauvais auspices, avec cette nomination controversée. Elle donne l’image d’un amateurisme persistant au sommet de l’État, voire d’une volonté délibérée de contourner les règles de déontologie et de moralité républicaine dans la conduite des affaires de l’Etat. Certains observateurs n’hésitent pas à penser que des proches du président Brice Clotaire Oligui Nguema le poussent insidieusement à commettre des fautes politiques majeures. Pourtant, il est difficile de croire que les conseillers du chef de l’État aient pu ignorer que la fonction de ministre de l’Économie et des Finances est juridiquement et éthiquement incompatible avec celle de PDG d’un établissement bancaire, en particulier dans un contexte de rigueur et de transparence dans la gestion des affaires publiques.
Dans ce contexte préoccupant, la décision finale revient au président de la République. Il lui appartiendra de trancher, afin d’éviter toute dérive préjudiciable à la crédibilité de nos institutions et à la confiance du peuple dans les politiques publiques et par ricochet dans le nouveau régime. Ce choix sera un test majeur pour la sincérité de la volonté de changement que le président Oligui Nguema ne cesse de proclamer dans ses discours.