Gabon: après avoir annoncé que Sylvia et Noureddin ne seront pas libérés et « qu’un procès équitable aura lieu », Oligui Nguema envoie les Bongos en exil 

Le Président de la République qui avait pris l’engagement d’un procès équitable pour Ali Bongo et sa famille voit sa parole une énième fois dévoyée ©Montage Dépêches 241

Libreville, le 16 mai 2025-(Dépêches 241). La Ve République semble s’ouvrir sur un mensonge éhonté doublé d’un scandale judiciaire, discréditant assurément la parole présidentielle. Après avoir affirmé devant le monde entier que l’ex-première dame du Gabon, Sylvia Bongo Valentin, et son fils Noureddin Bongo Valentin, détenue à la prison centrale de Libreville, bénéficieraient d’un procès équitable, le Chef de l’État, Brice Clotaire Oligui Nguema, a finalement décidé de les exiler discrètement, en compagnie de l’ancien Président Ali Bongo Ondimba, en Angola. Cette décision suscite incompréhension et indignation, tant elle contredit les engagements solennels du chef de l’État. 

Incarcérés depuis le 30 août 2023, date du coup d’État qui a mis fin au régime Bongo, Sylvia et Noureddin Bongo Valentin ont quitté le territoire national en toute discrétion, à destination de Luanda. Cette mesure, prise sans aucune décision judiciaire préalable, vient entacher un peu plus le crédit de la parole d’Oligui Nguema. Lequel, lors d’une interview accordée à RFI et France 24, avait pourtant affirmé que les accusations contre Sylvia et Noureddin Bongo étaient fondées et que la justice gabonaise détenait des preuves irréfutables contre eux. 

Un procès devait donc, selon lui, permettre à la justice de faire toute la lumière sur leur situation. Or, avec leur départ en exil, il devient difficile de concevoir la tenue d’un quelconque procès. Cette volte-face renforce l’image d’un Chef d’État dont la parole semble constamment sujette à caution. Déjà, lors de la Transition, Oligui Nguema avait déclaré qu’il rendrait le pouvoir aux civils… avant de se raviser et de se faire élire. Une série de reniements qui soulève des interrogations légitimes sur la sincérité de ses engagements.

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Dans une République, où l’État de droit ne se limite pas à des discours, la justice constitue un pilier fondamental de la stabilité politique et sociale. Mais cette justice semble reléguée au second plan par un Président vraisemblablement plus soucieux de satisfaire certains intérêts dans l’opacité et le manque de transparence que d’assurer l’égalité de tous les citoyens devant la loi. Dans ces conditions, pourquoi maintenir en prison, les Cyriaque Mvourandjami, les fils Oceni, Yann Ghislain Ngoulou, les supposés complices de l’ex Première Dame et son rejeton ?

Cet exil, orchestré au mépris du peuple, symbolise, à n’en point douter, l’instrumentalisation de la justice à des fins politiques, et la persistance d’une gouvernance qui entretient l’impunité et la corruption comme mode de gestion. Il est incompréhensible que Sylvia Bongo et son fils aient pu quitter le pays sans que la justice ne se soit prononcée sur leur sort, de façon pernicieuse et dans la discrétion la plus totale, d’autant plus que les accusations à leur encontre sont d’une gravité extrême, notamment haute trahison, détournement massif de fonds publics, malversations financières en bande organisée, falsification de signature présidentielle, corruption, trafic de stupéfiants. 

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Plus choquant encore, leurs présumés complices sont toujours détenus, alors que les principaux accusés ont été libérés. Par cette décision arbitraire, le Président Oligui Nguema vient de priver la justice gabonaise d’un moment crucial qui aurait pu marquer le début de son indépendance. Dès lors, comment croire en la sincérité du serment présidentiel visant à défendre l’État de droit et à protéger le peuple gabonais ? Tout porte à croire que la gouvernance actuelle est guidée par des forces extérieures, poursuivant des intérêts contraires à ceux du pays. Si la libération de Sylvia Bongo et de son fils était inévitable, le minimum aurait été d’organiser, ne serait-ce qu’un procès, au terme duquel un non-lieu aurait pu être prononcé, dans le respect formel de la justice. À défaut, communiquer de façon transparente sur les raisons de cette sortie de détention et de leur départ en Angola. C’est cela  gérer la République avec transparence, éthique, responsabilité et respect des engagements républicains.  

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