
Libreville, le 25 mai 2025-(Dépêches 241). Le nouveau Ministre de l’Économie et des Finances, Henri-Claude Oyima, semble déterminé à impulser une dynamique d’assainissement effectif des finances publiques et à réduire drastiquement le train de vie de l’État. En effet, après avoir suspendu les financements liés aux missions des agents publics à l’étranger, il vient de décider de la suspension des baux administratifs jugés anormalement élevés, dans un contexte où le Gabon traverse une situation financière peu reluisante. Le Ministre entend ainsi instaurer une nouvelle orthodoxie financière, visant une gestion des fonds publics plus rigoureuse, efficace et responsable.
Henri-Claude Oyima, nouveau patron des finances de l’État, également en charge des Participations, de la Dette et de la Lutte contre la vie chère, s’est adressé aux Directions Générales concernées par le financement des baux administratifs, notamment la Direction Générale du Budget, celle du Patrimoine, de la Comptabilité publique et du Contrôle Budgétaire, à travers une note datée du 16 mai 2025. Dans ce document, il acte la suspension immédiate des paiements liés aux charges locatives de l’État, dont le coût a explosé de 275 % entre 2013 et 2025. Il justifie cette décision radicale par la hausse vertigineuse des loyers administratifs, passés de 6,6 milliards en 2013 à plus de 25 milliards de francs CFA en 2025. Une situation alarmante qui met en péril la capacité de l’État à assumer régulièrement ses charges.
Un tel déséquilibre budgétaire entraîne des conséquences fâcheuses, perpétuant un cycle vicieux d’endettement qui plombe les finances publiques. La dette relative aux baux administratifs s’élève à 39,1 milliards de francs CFA, auxquels s’ajoutent des impayés de 28,2 milliards, soit une charge locative totale de 67,3 milliards de francs CFA. Un poids considérable pour des finances publiques déjà en grande difficulté. Cette dérive financière, particulièrement inquiétante, pourrait, si elle perdure, plonger l’État dans une grave crise susceptible de perturber durablement ses caisses.
Selon le diagnostic du ministère, cette situation, assimilable à une véritable hémorragie financière, résulte de plusieurs facteurs: la multiplication des entités administratives, l’absence de politiques réelles de réhabilitation et d’entretien du patrimoine immobilier de l’État, la démolition de la Cité de la Démocratie, et surtout, « la gestion peu orthodoxe des crédits alloués ».
Dans sa note, le ministère dénonce des pratiques opaques et une absence flagrante de stratégie clairement définie dans le domaine immobilier public. Il met en lumière une tendance de l’État à privilégier la location plutôt que la construction et l’entretien de ses propres bâtiments administratifs. Une situation qui laisse penser que certains propriétaires de ces locaux, en collusion avec des administrations complices, profiteraient de la situation au détriment du contribuable gabonais.
Cela dit, si cette décision est, certes applaudie par une grande partie de l’opinion publique, pour la rigueur qu’elle impose dans la gestion des ressources financières de l’État, il convient toutefois de souligner qu’à long terme, elle pourrait s’avérer périlleuse. Les administrations publiques risquent d’être évincées des locaux qu’elles occupent, ce qui pourrait entraîner un ralentissement drastique des services publics, déjà en difficulté pour répondre aux attentes des usagers. Par ailleurs, les propriétaires et les services environnants pourraient subir une récession, avec le risque d’une crise immobilière et sociale, dans la mesure où ces loyers constituent souvent l’unique source de revenus pour les bailleurs et les agences immobilières concernées.
Bien que cette mesure mette en lumière la nécessité de mener des enquêtes et un audit sur cette manne financière, elle doit être appliquée avec prudence pour éviter l’apparition d’effets collatéraux désastreux, notamment une hausse du chômage. Il devient ainsi impératif pour le ministère dirigé par Henri-Claude Oyima de trouver un équilibre: sortir du cercle vicieux des baux administratifs sans vision claire, tout en veillant à préserver la cohésion sociale, gage de paix et de stabilité. Cette mesure marque un tournant décisif vers une gestion financière plus rigoureuse dans le cadre de la Ve République.