3 émissions infructueuses de titres publics: quand le marché régional tourne le dos à un État en perte de crédibilité

Le Gabon perd de plus en plus en crédibilité sur les marchés financiers © DR

Libreville, le 25 avril 2025 – (Dépêches 241). Trois émissions infructueuses de titres publics sur le marché régional de la dette en l’espace de quelques semaines : le Trésor gabonais vient de subir un revers sans précédent, révélateur d’un désintérêt inquiétant des investisseurs. Aucune souscription enregistrée, malgré des conditions relativement attractives, ce qui souligne un niveau de défiance rarement observé à l’égard d’un État souverain dans la zone CEMAC. Ce désintérêt massif illustre la dégradation rapide de la confiance du marché vis-à-vis de la gestion des finances publiques gabonaises depuis la transition politique d’août 2023.

Ce désaveu intervient dans un contexte où les signaux négatifs s’accumulent : arriérés de paiement envers la Banque mondiale à hauteur de 17 milliards de FCFA, suspension des décaissements internationaux, perte de repères budgétaires, et une gouvernance économique toujours jugée peu lisible. Les investisseurs, qui scrutent attentivement les engagements et la rigueur des États emprunteurs, considèrent désormais le Gabon comme un débiteur à haut risque, peu fiable et susceptible de faire défaut. Les effets de communication du gouvernement de transition ne suffisent plus à masquer l’absence de garanties concrètes.

Pourtant, en novembre 2024, le Gabon avait suscité un regain d’intérêt en procédant au rachat de la moitié de son eurobond de 605 millions de dollars. Ce mouvement, perçu comme un signal positif, laissait entrevoir un début de redressement. Mais cette dynamique s’est rapidement essoufflée, faute de réformes structurelles tangibles, d’un pilotage macroéconomique cohérent, et d’un véritable effort de diversification économique. Le pays reste tributaire de ses recettes pétrolières, volatiles et insuffisantes pour stabiliser durablement sa trajectoire financière. 

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La dégradation de la note souveraine du Gabon par l’agence Fitch Ratings a fini de sceller le doute : le pays ne rassure plus. Loin de là. Avec une dette publique qui dépasse les seuils de soutenabilité fixés par la CEMAC et une absence de trajectoire budgétaire crédible, le climat d’investissement s’est détérioré. Les créanciers, désormais sur la défensive, n’envisagent une réintégration du Gabon sur le marché que si celui-ci démontre un réel engagement à rétablir ses équilibres macroéconomiques. 

Face à cette spirale de désengagement, les autorités gabonaises doivent impérativement envoyer des signaux clairs : reprise des paiements envers les bailleurs internationaux, réduction de la masse salariale publique, assainissement du circuit budgétaire et réformes concrètes en matière de transparence. Faute d’une réponse rapide et sérieuse, le Gabon risque une marginalisation prolongée sur les marchés financiers régionaux, avec des conséquences lourdes pour ses capacités de financement et son développement.

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