
Libreville, le 28 Juillet 2025 – (Dépêches 241). En 1996 déjà, les Gabonais identifiaient la dépendance au pétrole comme un frein au développement. « L’économie gabonaise reposait essentiellement sur la rente pétrolière, entraînant une forte dépendance extérieure », indique le rapport. Cette vulnérabilité devait être corrigée par une diversification économique. Mais presque trois décennies plus tard, rien n’a changé. Le pétrole est toujours roi, et toute l’économie nationale se plie à ses caprices. Quand les cours chutent, le pays titube sans solution.
Au contraire, la dépendance s’est renforcée. Les tentatives de diversification par le secteur minier, le bois ou l’agriculture ont été symboliques ou inefficaces. Le document Gabon vision 2050 note que « les stratégies économiques post-coloniales basées sur les ressources pétrolières et forestières avaient échoué à diversifier l’économie ». Ce constat pourrait être recopié mot pour mot dans un rapport de la Banque mondiale en 2024. Et ce malgré la multiplication des plans dits « émergents », qui n’ont jamais quitté les tiroirs.
Et pour cause : en 2023 encore, le pétrole représentait près de 80% des recettes d’exportation et plus de 50% du budget de l’État. En cas de chute des prix, le pays replonge dans la rigueur. Rien n’a été anticipé. Le pétrole, au lieu d’être un levier de transition, est resté un outil de rente. Même le CTRI au pouvoir depuis 2023 continue de s’appuyer sur cette manne, faute de stratégie alternative crédible. Cela montre que le système résiste plus que les hommes qui passent.
Ce refus de sortir du pétrole est moins une incapacité qu’un choix. Il permet de concentrer le pouvoir, de maintenir les clientélismes, et d’éviter des réformes douloureuses dans le foncier, l’agriculture ou l’éducation. « Le Gabon est un pays riche en ressources naturelles, mais avec toutes les caractéristiques structurelles d’un pays pauvre », rappelle crûment le rapport. Une rente mal redistribuée alimente l’immobilisme politique, et empêche toute émergence réelle.
Tant que le pays ne se résoudra pas à transformer son modèle économique, il ne pourra aspirer à l’émergence réelle. Le pétrole est un piège à ciel ouvert. L’exemple du Sénégal, qui a su développer son secteur agricole et technologique malgré l’arrivée récente du gaz, prouve qu’une autre voie est possible. Mais pour le Gabon, ce que l’on refuse de transformer aujourd’hui coûtera dix fois plus cher demain. Et dans tout ça, les dépenses de fonctionnement augmentent, grèvent les investissements et les marges de manœuvres.