Libreville, le 3 juillet 2023 (Dépêches 241). Alors que certaines questions essentielles telles que le développement de l’agriculture, de l’élevage, de la pêche, de la culture, de l’éducation populaire, la construction de logements pour des populations de plus en plus paupérisées ou encore la salubrité publique semblent laissés de côté faute de volonté de la part du gouvernement, certaines par contre, semblent prioritaires. C’est le cas des dépenses militaires qui ne cessent de croître, et, qui viennent d’ailleurs d’être une nouvelle fois portées au pinacle à travers l’achat prochain par le gouvernement, d’un avion militaire Casa de type C295 MTA.
Passée quasiment inaperçue en dépit de son caractère inopportun en ces temps de multiplication de crises économiques et de tensions inflationnistes, l’autorisation du gouvernement de contracter un emprunt de 47,5 millions d’euros (soit près de 32 milliards FCFA) auprès de la Banque Santander pour l’acquisition d’un avion Casa de type C 295 MTA, continue d’alimenter les interrogations. Représentant l’équivalent de 20% d’un budget de la défense 2023, l’achat de cet avion militaire suscite de vives réactions notamment auprès des observateurs de la sphère économique. Et ces raisons sont particulièrement légitimes.
Prévu sur financement extérieur malgré un budget de la défense fixé à 160 milliards de FCFA pour l’année en cours et qui représentait pas moins de 173 milliards de FCFA pour l’année écoulée, l’achat de ce petit avion de transport tactique du constructeur aéronautique européen Airbus, semble n’obéir à aucune logique stratégique puisque son acquisition n’était d’ailleurs pas prévu sur le budget de l’Etat. Dès lors, la question de sa priorisation au détriment de sujets centraux tels que le développement agricole, la salubrité publique, la santé ou l’éducation, interpelle.
Dans un contexte de bilan de l’exécution de la stratégie et d’identification des axes d’amélioration et d’accélération de la transformation de notre économie comme annoncé en grande pompe dès 2021, mais surtout dans une volonté de repriorisation du portefeuille d’investissements pour aboutir à un programme triennal, difficile pour le gouvernement avec de telles dépenses, « d’impulser une dynamique d’appropriation de la stratégie par les parties prenantes » comme indiqué dans le Plan d’Accélération de la Transformation (PAT). Une stratégie qui peine d’ailleurs à porter ses fruits d’un point de vue opérationnel malgré des moyens colossaux.
Pour sa part, censé renforcer « les capacités opérationnelles de l’Armée de l’Air », cet avion qui semble destiné à des fins électorales au regard des échéances à venir, vient plutôt renforcer l’idée d’incapacité du gouvernement à satisfaire les besoins primaires de ses populations à travers des dépenses d’investissements ciblées, au détriment de dépenses quasi ostentatoires dans le contexte actuel. Lancée en 2001, la production de cet avion commandé depuis à plus de 220 exemplaires par une trentaine de pays dont l’Inde, qui pour le coût en a confié la fabrication à son industriel local TATA en septembre dernier, continue donc sa percée.