Gabon: quand les parlementaires de la Transition sapent les fondements de l’État de droit ?

Le Parlement de la Transition n’a pas rempli le rôle de restauration qui lui a été assigné préférant s’aplatir devant les réformes contestées des militaires ©DR

Libreville, le 30 janvier 2025 – (Dépêches 241). L’arrivée au pouvoir des militaires en août 2023 a conduit à une situation exceptionnelle: la nomination d’un parlement de Transition, à l’effet de doter le pays d’un cadre juridique et institutionnel résilient devant permettre l’émergence d’un véritable État de droit à l’issue de la Transition. Or, à la lecture des actes pris par ce dernier, l’opinion est en droit de penser qu’il aurait davantage ruiné les fondations de l’État de droit authentique qu’il en aurait participé à bâtir.

Après la prise de pouvoir par les militaires fin août 2023, la nomination d’un parlement de Transition a suscité énormément d’attentes chez les populations, particulièrement dans le souhait de voir enfin émerger un excellent cadre juridique, gage de l’émergence d’une véritable démocratie et d’un État de droit. 17 mois plus tard, c’est la désillusion pour beaucoup. Entre lois discriminatoires et violations de nombreuses procédures, les parlementaires de la Transition ont considérablement sapé les fondements de l’État de droit et de la démocratie.

Alors qu’on s’achemine vers la fin de la Transition en cours, les 17 mois déjà traversés sont un excellent millésime pouvant permettre d’apprécier sans complaisance le travail effectué par ces parlementaires. Modifications sournoises de la Charte de la Transition et de plusieurs textes, prise en compte insuffisante des 801 amendements formulés au projet constitutionnel soumis à référendum en novembre dernier, exclusions de plusieurs catégories de compatriotes à l’élection présidentielle, pourtant éligibles hier, levée temporaire d’incompatibilités électorales pour les magistrats, les forces de défense et sécurité ainsi que les comptables publics, pour leur permettre de participer désormais aux élections, voilà autant de dérapages graves dont se sont rendus coupables les parlementaires de la Transition.

Ces actes pris par les députés et les sénateurs de la Transition sont d’une gravité inouïe, au regard des conséquences qu’ils induisent. Avec la levée d’incompatibilités électorales pour les magistrats et les forces de défense et sécurité, l’ordre constitutionnel et l’État de droit pourraient se trouver gravement menacés, d’autant plus qu’ils consistent précisément en ce que chaque entité constitutionnelle se borne à sa place. En clair, inviter les magistrats et les militaires dans la sphère politique, ruinerait définitivement les principes même de neutralité que ces deux corps doivent absolument incarner.

Une posture également soutenue par Hubert Aubame, Président du Parti Souverainistes-Écologistes. « Je regrette que le parlement de Transition ait pu donner suite à une telle ignominie. On ne peut pas être juge et partie en même temps. La neutralité des magistrats et des militaires est une garantie fondamentale pour l’État de droit. Là encore, celui qui dit qu’il veut établir l’État de droit ne fait que trahir ce vœu sous couvert de le mettre dans une loi votée par un parlement désigné et acquis à sa cause », a-t-il déploré dernièrement.

Autant le dire clairement, pour une part importante de gabonais, le parlement de la Transition qui devait servir à bâtir des lois et des institutions fortes pour l’avènement d’une démocratie véritable au Gabon, semble avoir échoué dans cette mission, et les conséquences des actes législatifs et réglementaires pris par ce dernier seront bientôt expérimentés.

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