Présidentielle 2025 au Gabon : Le choc des stratégies, l’appel à la conscience nationale

Les 8 candidats à l’élection présidentielle dont le favori Brice Clotaire Oligui Nguema © DR

Libreville, le 6 avril 2025 – (Dépêches 241). Le 12 avril prochain, le Gabon vivra une élection présidentielle pas comme les autres. Pour la première fois depuis l’indépendance, le pays s’apprête à élire un nouveau président dans un contexte de transition militaire, après le coup d’État du 30 août 2023 qui a mis fin à plus de 50 ans de règne du Parti Démocratique Gabonais (PDG). À l’heure où les institutions se cherchent, où la nation se redéfinit, où les blessures récentes et anciennes se croisent, cette élection revêt une dimension historique. Le peuple gabonais n’élira pas seulement un chef d’État. Il décidera de l’âme politique de son avenir.

Un paysage confus mais animé

Huit candidats sont officiellement en lice. Pourtant, sur le terrain, deux figures captent toute l’attention : Brice Clotaire Oligui Nguema, président de la transition, et Alain-Claude Bilie-By-Nze, ancien Premier ministre. Leur face-à-face structure le débat, cristallise les tensions et mobilise les passions. Le reste du panel présidentiel est pour l’instant marginalisé dans un bruit médiatique où la visibilité vaut autant que le programme.

Ce duel cache cependant une réalité plus trouble. Des candidatures écartées – dont celle, controversée, de Jean-Rémy Yama, figure syndicale – laissent un goût amer dans l’opinion. Des accusations d’exclusion politique planent sur le processus. En parallèle, Yama appelle aujourd’hui à l’abstention, affaiblissant davantage la confiance dans la transparence du scrutin.

Deux visions, deux récits, deux styles

Oligui Nguema incarne la continuité d’une transition assumée. Sa campagne s’apparente à une démonstration de force : affiches omniprésentes, communication millimétrée, mobilisation d’artistes et de personnalités publiques, slogans martelés à l’unisson. Le style rappelle les grandes heures d’Ali Bongo, mais avec l’aura de l’homme du 30 août, perçu comme le libérateur d’un régime moribond. Il s’appuie sur son programme de « reconstruction », avec des projets ambitieux comme Libreville 2, symbole de la modernité qu’il souhaite impulser.

Bilie-By-Nze, à l’inverse, joue la carte de la proximité. Loin des grandes foules, il sillonne les quartiers, les villages, les confins du pays. Sa stratégie repose sur les « causeries de vérité », où il écoute les populations, explique, propose et tente de convaincre. Son projet de société se veut une rupture avec le système ancien. Il reconnaît les erreurs du passé – dont il fut en partie acteur –, demande pardon, et propose des mesures fortes, comme une allocation de 150 000 FCFA aux chômeurs diplômés, le temps de retrouver un emploi.

Mais cette démarche peine à convaincre une frange importante de la population. Beaucoup le considèrent comme le symbole d’un régime déchu. La mémoire de ses prises de parole en tant que porte-parole du gouvernement Ali Bongo pèse lourd dans l’inconscient collectif.

Derrière les foules, la majorité silencieuse

L’enthousiasme visible autour de la candidature d’Oligui Nguema ne doit pas masquer une réalité plus complexe : toutes les personnes présentes dans les meetings, dans les concerts ou dans les rassemblements politiques ne sont pas inscrites sur les listes électorales. Il existe au Gabon une majorité silencieuse, souvent absente des débats publics, mais décisive dans les urnes. C’est cette majorité-là qui, loin du vacarme des campagnes, peut faire basculer l’élection. 

Et c’est à elle que cette présidentielle s’adresse véritablement. Non pas aux militants fanatiques, ni aux opportunistes de dernière heure, mais à tous ceux qui veulent un vrai changement, une véritable renaissance. La question n’est pas de savoir qui fait le plus de bruit, ni même qui promet le plus. La vraie question, c’est : de quoi avons-nous besoin pour sortir le Gabon de son impasse historique ? 

Un choix de société, une responsabilité collective

Nous ne devons pas voter avec nos émotions. Ce n’est pas une histoire de vengeance, de popularité ou de rancune. Cette élection n’est pas une revanche. C’est un choix de société. Il s’agit de savoir qui, parmi ces candidats, incarne réellement un projet solide, crédible et profondément transformateur pour le Gabon. 

Faisons l’effort de lire les programmes. Posons-nous les vraies questions : comment reconstruire un État de droit ? Comment redonner à la jeunesse sa place ? Comment relancer l’économie, l’école, la diplomatie ? Quel candidat est prêt à mettre fin aux privilèges, à affronter les vérités, à bâtir un Gabon inclusif, fort, respecté et digne ? 

Le 12 avril, notre vote ne sera pas seulement un acte citoyen. Il sera un acte historique. Que chacun écoute sa conscience. Que chacun pense à ses enfants. Que chacun, au moment de glisser son bulletin dans l’urne, pense à ce qu’il veut léguer à la génération suivante. 

Que les ancêtres nous guident. Et que le peuple reste éveillé.  

Lewis Tokinlo Maroundou, DG D’EXO Technologie

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