Gabon: sur quoi repose le financement du Plan d’Investissements d’Oligui Nguema ?

Brice Oligui Nguema devra faire preuve d’ingéniosité et de responsabilité pour mettre en oeuvre son Plan d’Investissement  © DR

Libreville, le 15 avril 2025 – (Dépêches 241). Lors de l’émission « 1 candidat, 1 projet », Brice Clotaire Oligui Nguéma a dévoilé un ambitieux plan d’investissements publics visant à injecter 1 000 milliards FCFA par an dans l’économie gabonaise, soit un total de 7 000 milliards sur un mandat de sept ans. Cette initiative, qui couvre des secteurs aussi cruciaux que les infrastructures, la santé, l’éducation, et l’agriculture, témoigne d’une volonté de transformation profonde du pays. Mais derrière cette promesse se cache une question centrale : comment financer un tel projet sans plonger le pays dans un surendettement insoutenable ?

Le plan d’Oligui Nguéma repose sur un financement à hauteur de 75% par l’emprunt, soit environ 5 250 milliards FCFA. Un tel recours massif à la dette soulève des préoccupations légitimes, surtout en tenant compte de la situation financière déjà fragile du Gabon. En 2023, la dette publique gabonaise dépassait les 7000 milliards FCFA, soit environ 65% du PIB, jusqu’en septembre dernier elle était autour de 7075 milliards de FCFA et le service de la dette représente déjà une part importante du budget national. Ajouter 5 250 milliards d’emprunts à cette équation pourrait alourdir considérablement la charge de la dette, mettant à mal la soutenabilité financière à long terme du pays.

Le recours à l’emprunt n’est pas nécessairement problématique en soi. De nombreux pays financent leur développement par la dette, notamment pour des projets d’infrastructures générateurs de revenus futurs. Cependant, la réussite de ce financement dépend largement de la rentabilité des investissements réalisés et de la capacité du pays à gérer efficacement les fonds empruntés. Or, à ce jour, les modalités exactes de ce financement restent floues. L’absence de détails sur les mécanismes d’emprunt, nourrit l’incertitude quant à la viabilité du projet. Cette opacité empêche d’évaluer correctement la faisabilité de l’ambition annoncée.

Un autre aspect critique réside dans la gestion de la dette future. Si ces emprunts ne génèrent pas de retours économiques substantiels dans des délais raisonnables, le Gabon pourrait se retrouver dans une spirale de dépendance vis-à-vis des créanciers, avec des taux d’intérêt élevés, notamment en raison de la notation spéculative du pays. Ce facteur de risque pourrait limiter la capacité de l’État à emprunter à des conditions avantageuses, alourdissant ainsi le fardeau financier du pays.

Par ailleurs, la question de la gouvernance et de la transparence dans l’exécution de ces projets est primordiale. Depuis la transition, plusieurs contrats d’envergure ont été signés sans appels d’offres publics, et financés par l’État. Si cette pratique se généralise dans le cadre de ce plan d’investissement, elle pourrait mener à des gaspillages, des détournements de fonds, ou encore à une mauvaise allocation des ressources. Les promesses de modernisation de l’administration et d’efficacité des investissements ne seront convaincantes que si des mécanismes stricts de contrôle et de suivi sont mis en place. Sinon, l’absence de discipline dans l’exécution des projets pourrait rendre l’ambitieux programme d’investissements non viable.

Bien que l’ambition du candidat Oligui Nguéma soit louable et nécessaire pour le développement du Gabon, le financement de son plan d’investissement soulève des interrogations sérieuses. Sans une stratégie claire, transparente, et rigoureusement appliquée, le pays pourrait se retrouver pris dans un piège de dette, avec des conséquences économiques graves pour les générations futures. Le financement de ce projet mérite une attention toute particulière, et il serait judicieux d’attendre des précisions sur la manière dont l’État compte mobiliser ces ressources, tout en préservant sa stabilité financière. 

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