Démantèlement de Plaine Orety: déguerpissement de certains riverains sans indemnisation ?

Si certains habitants avaient déjà reçu une indemnisation, d’autres par contre ont subi la mesure et vu voler en éclat leurs investissements © DR

Libreville, le 02 juin 2025-( Dépêches 241). De nombreux habitants de Plaine Orety se retrouvent à la belle étoile depuis ce matin. En cause: les plus hautes autorités de l’État auraient ordonné la destruction du quartier, dans le cadre d’un projet de construction d’une voie reliant le feu tricolore de Jeanne Ebori au boulevard Triomphal. Ce projet s’inscrit dans la perspective d’édifier des logements destinés aux fonctionnaires, notamment ceux des deux chambres du Parlement. Toutefois, les populations affirment avoir été surprises par la célérité de l’opération, sans avoir reçu la moindre indemnité, ni proposition de relogement de la part de l’État.

Tôt ce matin, les habitants de Plaine Orety ont été surpris par la présence des agents de la mairie de Libreville, accompagnés du génie militaire. Ces derniers leur ont intimé l’ordre de quitter immédiatement leurs habitations, préalablement promises à la démolition. Sans ménagement, les populations ont été contraintes de s’exécuter, sous peine d’être ensevelies sous les décombres de leurs propres maisons. Ceux qui ont tenté de faire valoir leurs droits de citoyens auraient été confrontés à une violence inouïe de la part des forces de l’ordre, parfois accompagnée d’humiliations publiques, devant femmes et enfants. Une situation particulièrement avilissante, qui rappelle tristement les pratiques du régime déchu. Plus que jamais, la Ve République semble ne pas se démarquer de l’ancienne.

Ce qui inquiète davantage, c’est que plusieurs riverains affirment n’avoir jamais reçu d’indemnisation pour ce déguerpissement, ni bénéficié d’un début de relocalisation, même provisoire. Face à cette situation, de nombreuses interrogations surgissent dans les esprits: l’édification de la Ve République doit-elle se faire au prix de la déshumanisation des citoyens gabonais ? Le plébiscite ayant porté Brice Clotaire Oligui Nguema au pouvoir n’aurait-il été qu’un chèque en blanc offert à l’oppression et à la violation systématique des droits fondamentaux des populations ? La Ve République n’aurait-elle que des droits, sans aucune obligation envers les citoyens qui la composent ?

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Une chose est sûre: ce projet de construction de la cité administrative, dans lequel s’inscrivent ces destructions, continue de susciter la colère des populations, qui dénoncent des pratiques autoritaires en totale contradiction avec les promesses du Chef de l’État. Ce dernier s’était pourtant engagé à bâtir un Gabon fondé sur un véritable État de droit et une gouvernance transparente. Or, il y a quelque temps déjà, la question du déguerpissement de Plaine Orety avait provoqué une première mobilisation des habitants, qui dénonçaient déjà l’opacité du traitement du dossier. À la surprise générale, les autorités justifieraient aujourd’hui leur action par des indemnisations supposément versées en 1996, selon certains résidents.

En définitive, la situation vécue par les habitants de Plaine Orety depuis ce matin semble irréelle, tant elle illustre un traitement inhumain réservé par l’État à ses propres citoyens. Certes, la nouvelle Constitution a entériné le principe selon lequel la terre appartient à l’État. Mais cela ne saurait dispenser ce dernier de ses obligations régaliennes envers les citoyens. Si ce projet d’aménagement urbain peut être louable pour l’esthétique et l’organisation de la capitale, il ne doit en aucun cas se faire au mépris des droits fondamentaux des populations. Il est donc urgent que les représentants de l’État mettent en place des canaux de dialogue, afin de contenir ou éviter une crise sociale majeure.

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