Banquier, client, prêteur, décideur , bénéficiaire: l’économie et la finance version Henri Claude Oyima ?

Quand le ministre Henri Claude Oyima joue au yoyo entre fonds privés et argent du contribuable © DR

Libreville, le 4 juillet 2025 – (Dépêches 241). Ah, le Gabon, ce pays où les frontières entre public et privé sont aussi floues qu’un mirage sahélien ! Henri-Claude Oyima, ministre d’État chargé de l’Économie, des Finances, de la Dette et des Participations, a trouvé la quadrature du cercle : être à la fois le banquier et le client, le prêteur et l’emprunteur, le décideur et le bénéficiaire. Un exploit digne des plus grands jongleurs, mais avec 140 milliards de FCFA en jeu, ça ne fait plus rire grand monde.

Le 28 juin 2025, sous les ors du palais présidentiel, Henri Claude Oyima signe un prêt de 140 milliards de francs CFA pour bitumer la route Alembe–Mikouyi. Jusque-là, rien d’extraordinaire, si ce n’est que le chèque est signé… par lui-même, en tant que ministre, et contresigné par lui-même, en tant que président-directeur général de BGFIBank, la banque prêteuse. Une double casquette qui ferait pâlir d’envie un prestidigitateur : un coup de baguette, et l’État devient client, la banque devient prêteur, Oyima devient… gagnant sur tous les tableaux.

Une banque privée qui prête à l’Etat. Le propriétaire de la banque n’est tout autre que le ministre de tutelle qui gère l’Économie et les Finances publiques du pays. Rien que ça ! Ce dernier va donc encaisser les dividendes et se remplir les poches sur le dos de l’Etat. Un véritable scandale normalisé, drapé des oripeaux mystificateurs d’un développement urbain vendu comme l’unique Essor vers la Félicité. 

Mais le spectacle ne s’arrête pas là. Avec 27% des parts de BGFI Holding Corporation SA détenues par sa holding familiale Nahor Capital, Oyima empoche une part juteuse des intérêts générés par ce prêt. À un taux hypothétique de 5%, cela représenterait près de 1,9 milliard FCFA par an, soit 24 fois le salaire officiel d’un ministre d’État. Une rémunération privée dopée par une décision publique, voilà le jackpot !

Le plus cocasse ? Depuis son entrée au gouvernement, BGFIBank est devenue le banquier quasi-exclusif du Trésor public gabonais. Les comptes de l’État y fleurissent, les dépôts s’accumulent, et les critiques fusent, évoquant un « Congo Hold-up » à la gabonaise, où la banque serait au cœur d’une prédation silencieuse des finances publiques sous le regard complaisant des vendeurs de l’illusion d’une Ve République épamprée de ses maux d’antan. 

Un ministre banquier qui confond le coffre privé de l’Etat ou coffre fort personnel ? 

Face à ce feuilleton digne d’un roman d’espionnage financier, la « Nouvelle République » d’Oligui Nguema mise à rude épreuve, assiste, cautionne, mieux valide les transactions sous fond de conflit d’intérêt. Le président, qui promettait la rupture, a misé sur l’expertise d’Oyima, mais la créature semble lui échapper. Ce dernier promet un « recul » tout en conservant la présidence du conseil de la banque. Un recul à géométrie variable qui laisse perplexe.

Il est grand temps de lever le voile sur les conditions exactes de ces contrats : taux, commissions, échéances. Et surtout, trancher l’imbroglio Henri Claude pour Oyima : ministre ou banquier ? Pas les deux. Car à ce rythme, chaque projet public risque fort de devenir un jackpot privé, et le Gabon un théâtre où se joue la comédie des conflits d’intérêts en prime time.

En attendant, le Gabon continue de rouler sur les mêmes ornières, avec pour conducteur un ministre-banquier qui semble avoir confondu le coffre-fort de l’État avec son propre coffre personnel. Une fable moderne où l’intérêt général se fait doubler par l’intérêt particulier, et où la transparence reste un mirage… à moins que le prochain acte ne vienne enfin éclairer la scène. 

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