Gabon: dans un monologue et armé de quelques fiches, Oligui détaille son projet de société

Brice Clotaire Oligui Nguema, avant son passage à l’émission, « Un candidat, un projet » © DR

Libreville, le 9 avril 2025 – (Dépêches 241). Hier 8 avril 2025, Brice Clotaire Oligui Nguéma, candidat à la présidence du Gabon, a présenté son projet de société lors de l’émission « Un candidat, un projet ». Bien que l’émission ait mis en lumière sa vision pour le pays, plusieurs aspects de son programme ont suscité des interrogations. Visiblement épargné par les journalistes et armé de quelques antisèches , le candidat a détaillé ses ambitions de transformation, évoquant des investissements colossaux, un recours massif à l’endettement, ainsi qu’une série de réformes dans les secteurs de la justice, de l’économie et de la gouvernance.

Parmi les points majeurs de son discours, l’idée d’un plan d’investissement public de 7 000 milliards FCFA en sept ans a retenu l’attention. Ce programme ambitieux, visant à moderniser les infrastructures du Gabon, a été annoncé comme la clé pour l’avenir du pays. Oligui a assuré que 75 % de cette somme proviendrait de nouveaux emprunts, un pari risqué qui met en évidence l’ampleur du défi financier à venir. Toutefois, la question du financement de cet investissement massif demeure en suspens, en particulier dans un contexte où la dette publique du Gabon avoisine déjà les 6 000 milliards FCFA.

Dans le même registre, le candidat a abordé la question de la justice et de la réforme des institutions publiques. Il a annoncé son intention de renforcer le système judiciaire gabonais, tout en insistant sur la nécessité d’assurer l’indépendance des magistrats. Pourtant, ce discours a été entaché par les pratiques de passation de contrats de gré à gré signées ces derniers mois, comme ceux avec des entreprises burkinabè pour des travaux publics, qui soulèvent des interrogations sur la transparence et la bonne gouvernance. Ces contrats, en dehors des circuits classiques de mise en concurrence, ajoutent une couche d’incertitude à la gestion future des fonds publics.

Le CEDOC, l’organisme en charge des réformes administratives, a également été mentionné dans son projet. Oligui Nguéma a mis l’accent sur l’importance de moderniser la gestion de l’État, en particulier à travers l’introduction de mécanismes numériques et de réformes structurelles pour rendre l’administration plus efficace. Néanmoins, des doutes subsistent quant à la capacité de l’administration gabonaise à absorber et à gérer un volume d’investissements aussi élevé, sans tomber dans des dérives de corruption ou de mauvaise gestion des fonds publics. La question de la soutenabilité budgétaire s’impose également avec force.

Enfin, le candidat a abordé la question de la diversification économique du Gabon. Il a évoqué l’industrialisation du pays, la transformation des produits locaux et l’amélioration des secteurs de l’agriculture, de l’éducation et de la santé. Mais encore une fois, la mise en œuvre de ces réformes, en lien avec un plan d’investissement massif, repose sur des hypothèses optimistes de mobilisations de ressources et de rentabilité des projets. L’ombre de l’endettement, avec des emprunts en devises étrangères, plane toujours sur l’avenir du Gabon, alors que la gestion prudente de la dette devrait être une priorité pour assurer la stabilité économique.

Ainsi, la présentation de son projet de société a mis en lumière des ambitions colossales et des défis structurels majeurs. Si la volonté de rupture affichée par Oligui Nguéma est évidente, la réussite de ses propositions dépendra largement de la manière dont il saura financer, mettre en œuvre et contrôler les projets ambitieux qu’il a esquissés. La gouvernance, la transparence et la capacité de gestion de l’État seront les clés pour éviter que ces projets ne sombrent dans les écueils de l’endettement excessif et de l’inefficacité administrative. 

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