
Libreville, le 9 avril 2025 – (Dépêches 241). Le récent passage d’Oligui Nguéma dans l’émission « 1 candidat, 1 projet » a révélé une dérive financière particulièrement choquante concernant la Direction Générale de la Documentation et de l’Immigration (DGDI), anciennement le CEDOC. Selon ses propos, cette institution, bien qu’étant une entité publique rendant des services régaliens, conserve une grande partie des recettes générées par la vente de documents officiels tels que passeports et visas. Selon le président de la Transition, la DGDI reverserait seulement 5% de ces recettes à l’État, s’en attribuant 95% pour ses propres besoins. Une telle situation, dans un contexte où l’État gabonais traverse des difficultés financières majeures, soulève des questions légitimes sur la transparence et la gestion de l’argent public.
La DGDI, en tant qu’organisme public, est censée être un bras armé de l’État pour la régulation de l’immigration et la sécurité intérieure. Ses recettes, qu’elles proviennent de l’établissement de passeports ou de visas, devraient être intégralement reversées au Trésor Public, selon les principes de gestion financière publique. L’idée qu’une telle institution s’accapare d’une proportion aussi importante de ses recettes pose problème, non seulement du point de vue juridique mais aussi éthique et de transparence gestion des fonds publics.
Pour mettre cette pratique en perspective, il est important de rappeler que la Cour des Comptes, dans son rapport de 2018, a révélé des irrégularités graves concernant la gestion des recettes de la DGDI. Entre 2005 et 2018, une partie substantielle des fonds collectés par cette administration avait été détournée vers un compte privé à la BGFI Bank, au lieu d’être reversée à l’agence comptable de l’État. Une somme colossale, estimée à plus de 51 milliards de FCFA, aurait ainsi échappé au Trésor Public.
Cette situation soulève une question brûlante : comment un État qui se dit à court de ressources financières, notamment pour payer les retraités ou financer des projets d’envergure, peut-il tolérer une telle dérive au sein de ses propres institutions ? Le fait que l’on puisse laisser une administration publique se prélever autant de recettes sans contrôle rigoureux est non seulement un manque flagrant de transparence, mais aussi une véritable maltraitance des finances publiques.
À l’heure où l’actuel président de la Transition, Oligui Nguéma, évoque des projets pharaoniques d’investissement de 1000 milliards de FCFA pour les sept prochaines années, il devient impératif de poser la question : comment prétendre réformer un pays avec des pratiques aussi déconnectées des réalités financières de l’État ? Si la gestion des recettes publiques est déjà aussi opaque et dysfonctionnelle dans une institution aussi cruciale, comment l’on peut espérer que de plus grands projets nationaux soient menés à bien avec cette même gouvernance ?