
Libreville, le 5 Juillet 2025 – (Dépêches 241). C’est le grand jour du lancement officiel du parti politique du président Brice Clotaire Oligui Nguema, au complexe Omnisport Omar Bongo. Mais la grande question qui brûle les lèvres des Gabonais, notamment des déguerpis des quartiers Plaine-Orety, Charbonnages et SNI Owendo, est la suivante : iront-ils massivement se faire enrôler dans le parti de celui qui, d’une main de fer, leur a fait perdre leurs maisons, ou choisiront-ils de se mettre en retrait et de poursuivre leurs vies de SDF imposée par les bulldozers de la Ve République ?
Dans un scénario digne d’une comédie noire, les habitants de ces quartiers sinistrés sont invités à célébrer l’unité et le rassemblement autour de leur bourreau politique, alors même que leurs effets personnels – meubles, documents, souvenirs – sont encore en train d’être sauvés de justesse des pelleteuses destructrices. La cadence des démolitions a curieusement ralenti, notamment dans les quartiers proches du lieu de la cérémonie, comme Kinguélé, Akébé et Petit-Paris, laissant planer un doux parfum de « trêve électorale » ou de « pause stratégique ».
Le président Oligui Nguema, après avoir fait une visite nocturne pleine d’empathie à Plaine Orety, où il a partagé un feu de camp avec une poignée de déguerpis, a tenté de jouer la carte de la proximité et de la compassion. Il a même encouragé les victimes à porter plainte contre les vendeurs illégaux de terrains, dédouanant ainsi l’État de toute responsabilité directe et annonçant un plan de relogement urgent qui attend toujours sa matérialisation. Une belle pirouette politique qui ne suffira sans doute pas à calmer la colère des familles jetées à la rue tels des pestiférés sans relogement.
Il faut rappeler que c’est bel et bien près de 3000 familles qui ont été mises à la rue avec ces démolitions. Alors, que feront ces Gabonais ? Se laisseront-ils endormir par ce soudain arrêt des démolitions et se précipiteront-ils en masse au lancement du parti de celui qui a transformé leurs quartiers en champs de ruines ? Leurs vies en cauchemars ? Le fruit de leur effort en poussière ? Leur héritage et sacrifice en débris ? Ou bien, dans un élan de lucidité, de survie et de dignité, préféreront-ils garder leurs distances, protéger leurs maigres biens et préparer la résistance silencieuse à venir ?
Ce 5 juillet 2025 est donc un jour à suivre de près : entre la célébration officielle d’un parti politique et le murmure sourd d’une population blessée, déshumanisée et délaissée, le spectacle promet d’être aussi tragique que comique. En attendant, les déguerpis de Libreville jonglent entre invitations à l’unité et menaces de démolition, entre espoir et désillusion, entre l’envie de croire et la nécessité de survivre.
Rendez-vous ce Samedi pour ne pas dire dans quelques heures, pour savoir si le peuple de Plaine-Orety et des quartiers expropriés choisira la danse du ventre politique ou la danse du feu… autour des cendres de leurs bâtisses, invitations et investissements.