Libreville le 19 mai 2022 – (Dépêches 241). S’il est un fait auquel l’esprit des Gabonais s’accoutume de plus en plus et vraisemblablement de mieux en mieux au détriment de la normalité, c’est la banalité du mal. Elle qui est aujourd’hui omniprésente dans toutes les sphères de la société, parce que produite et entretenue par trop de monde.
La banalité du mal, c’est d’abord ces violences auxquelles sont exposées les populations : les enlèvements et les crimes dits rituels pénétrés sur l’étendue du territoire sans vraiment que le gouvernement n’agisse avec vigueur, la hausse des prix du transport et des produits de premières maintenue comme durant la pandémie etc. On aurait vite fait de crier à l’incompétence de la classe dirigeante, mais cela serait bien trop facile à notre avis. Car, à dire vrai, elle n’explique pas tout. On doit à la lucidité de constater qu’il existe également un manque d’implication et de volonté politique avérées. Ce qu’on pourrait d’un trait nommer l’involonté.
La banalité du mal, c’est ensuite la production et la transmission d’une mentalité apathique qui, parfois, se situe aux limites de l’indifférence. Cette mentalité, c’est celle que manifeste la plupart des citoyennes et des citoyens qui espèrent d’un Etat lui-même désintéressé d’eux qu’il vienne tenir son rang et prendre à bras le corps ces problèmes partout présents. Cela relève strictement de la naïveté. D’autant que la citoyenneté oblige en droit de réagir autrement. Les journées entières passées dans les églises à attendre le secours du Ciel n’y changeront rien…
La banalité du mal, c’est également ce phénomène de la sexualité à outrance sans foi ni loi, faite par des adolescents à peine pubères et encouragés par les plus âgées qui en profitent et en jouissent. C’est cette idée qu’on peut se vendre au plus offrant et avec soi son avenir, son étoile, pour quelques billets et bien d’autres, le tout, pour impressionner ses semblables dans la société. C’est en outre Ces histoires de viol sur mineurs, incestes, partouzes, proxénétisme qui souillent le société gabonaise.
La banalité du mal, c’est enfin cette tendance que certains d’entre nos compatriotes ont à relativiser le pire en supposant que ce qui arrive aux autres ne les concerne pas. C’est l’indifférence que nous évoquions plus haut. Elle est de nature à fragiliser le lien social dans une société telle que la nôtre où l’empreinte ethnique pèse encore d’un poids considérable. Cela est insidieux, mais assurément pervers puisqu’on transmet par là l’idéal d’un vivre ensemble fondé sur l’égoïsme. D’ailleurs le chacun pour soi n’est-il pas aujourd’hui devenu la règle d’or ? Celle par laquelle on se disculpe presque tous crânement devant la violence diffuse.
En attendant d’agir chacun pour tous, prenons au moins le temps de la remise en cause de nos consciences. Consentons de vivre ensemble pour le meilleur de tous. Apprenons à nous insurger contre et devant le mal. Là est la vocation de la société…