
Libreville, le 22 Mai 2026 – (Dépêches 241). La suspension par l’Union européenne le 19 mai 2025 des importations de volailles en provenance du Brésil, en raison d’un foyer de grippe aviaire détecté dans le sud du pays, soulève de vives inquiétudes quant aux produits encore en circulation à travers le monde, notamment en Afrique. Alors que l’UE applique une politique sanitaire rigoureuse et préventive, plusieurs pays africains, dont le Gabon, ne disposent pas des mêmes outils de contrôle aux frontières. La question se pose donc avec acuité : des poulets potentiellement contaminés pourraient-ils atterrir dans les assiettes des consommateurs gabonais ?
Le Gabon importe une part importante de sa consommation de volailles de l’étranger, avec des cargaisons provenant de marchés divers, parfois à bas coût. Si le pays ne fait pas partie des principaux partenaires commerciaux directs du Brésil, il est néanmoins intégré dans des circuits de redistribution régionale où des produits brésiliens peuvent transiter via d’autres pays. Or, à ce jour, aucune annonce officielle des autorités sanitaires gabonaises n’a été faite concernant des mesures de précaution ou de restriction sur les volailles originaires du Brésil ou des zones touchées.
Ce silence interroge. La Direction générale de l’élevage ou le ministère de l’Agriculture n’ont pas communiqué sur l’éventuelle mise en quarantaine, l’intensification des contrôles vétérinaires ou même une sensibilisation des importateurs. Une telle inertie face à une alerte sanitaire mondiale révèle la fragilité des dispositifs gabonais de contrôle sanitaire à l’importation. Dans un contexte de flux commerciaux non tracés et d’importation par containers entiers de produits surgelés, l’absence de vigilance peut avoir des conséquences sanitaires majeures.
Le risque est d’autant plus grand que la grippe aviaire est une zoonose : elle peut, dans certains cas, se transmettre à l’homme. Sans un renforcement immédiat des contrôles et une meilleure coordination avec les partenaires commerciaux, le Gabon s’expose à une crise sanitaire évitable. La pression est aussi sur les distributeurs : grands importateurs, chaînes de supermarchés ou marchés informels doivent faire preuve de responsabilité dans leurs approvisionnements.
Au-delà de cette alerte, c’est toute la politique de sécurité sanitaire alimentaire du Gabon qu’il faut réévaluer. La dépendance aux importations et l’absence d’autonomie avicole rendent le pays vulnérable à chaque choc extérieur. La crise brésilienne doit servir de déclencheur pour bâtir des systèmes de veille, moderniser les infrastructures vétérinaires et surtout, encourager la production locale de volailles, gage de souveraineté alimentaire et de confiance des consommateurs.