Gabon: quand l’économie reste otage de ses matières premières selon la Banque Mondiale 

La diversification économique n’est plus seulement une alternative, elle est vitale et c’est en ce sens que la Banque mondiale tire la sonnette d’alarme © DR

Libreville, le 26 Juin 2025 – (Dépêches 241). À première vue, le commerce extérieur du Gabon se porte bien. En 2024, le pays a enregistré un excédent commercial estimé à 36,2% du PIB, un chiffre qui pourrait faire pâlir d’envie bien des économies africaines. Pourtant, derrière cette performance se cache une réalité plus sombre, près de 97% des exportations proviennent toujours du pétrole, du bois et du manganèse. En gros de la rente. Ce constat, mis en lumière dans la dernière note de conjoncture économique de la Banque mondiale publiée en juin 2025, confirme une dépendance extrême à des produits bruts, exposant dangereusement l’économie gabonaise aux aléas du marché international. 

Cette situation n’a rien de nouveau, mais elle devient de plus en plus insoutenable. Les prix du pétrole varient au gré des tensions géopolitiques et des décisions des grands producteurs mondiaux. Le bois et le manganèse, eux aussi, subissent la volatilité des marchés et la pression croissante des régulations environnementales. Le Gabon vit désormais sous perfusion, incapable de stabiliser ses recettes publiques ni de planifier des investissements durables. Chaque hausse de prix redonne un souffle temporaire aux finances publiques, mais chaque baisse ravive les déficits et les retards de paiement. 

La Banque mondiale tire donc la sonnette d’alarme. La diversification économique n’est plus seulement une alternative, elle est vitale. Mais force est de constater qu’elle tarde à se concrétiser. Les discours sur la transformation locale du bois, le développement de l’agro-industrie ou l’écotourisme sont répétés depuis plus d’une décennie. Pourtant, sur le terrain, les investissements restent marginaux, les incitations fiscales mal calibrées, et les obstacles administratifs dissuasifs. Le manque de volonté politique, l’opacité dans la gestion des filières stratégiques et les lenteurs bureaucratiques freinent toute initiative sérieuse. 

À tout cela s’ajoutent des conditions structurelles défavorables comme le coût de l’énergie qui demeure élevé, les infrastructures toujours aussi inadaptées, et le climat des affaires qui reste perçu comme incertain. Ce cocktail continue de dissuader les acteurs privés d’investir en dehors du secteur extractif. Tant que ces verrous ne seront pas levés, le pays restera prisonnier d’un modèle rentier, qui crée peu d’emplois, capte mal les richesses, et aggrave les inégalités. 

La dernière note de la Banque mondiale le rappelle sans détour. Une économie basée sur trois matières premières est une économie vulnérable, peu inclusive et à courte vue. L’avenir économique du pays ne peut pas se contenter éternellement du baril de pétrole ou des cargaisons de grumes. Il faut une politique volontariste, portée par des actes concrets, des réformes de fond et une transparence accrue dans la gestion des ressources. À force de retarder l’échéance, c’est toute la soutenabilité du modèle gabonais qui est en jeu.

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