Libreville, le 29 juin 2022 (Dépêches 241). C’est à n’y rien comprendre. Hier mardi à l’issue d’une audience que lui a accordé Ali Bongo Ondimba, Charles Mba s’est dit prêt à servir le pays aux côtés du pouvoir en place. Et pourtant, il y a quelques mois, l’ancien ministre délégué aux Finances n’était pas avare de récriminations et de critiques acerbes, à l’endroit du même régime qu’il jugeait d’ailleurs illégitime.
Comme annoncé par plusieurs médias proches du pouvoir, Charles Mba a été reçu par Ali Bongo Ondimba hier, au palais Rénovation de Libreville. Au terme de cette rencontre qui s’inscrit dans le cadre des discussions informelles que le Chef de l’Etat entretient avec les opposants et plus généralement la classe politique gabonaise, l’ancien ministre délégué aux Finances a affirmé sa volonté de se mettre au service du pays, aux côtés des autorités en place. « Je suis honoré d’avoir été reçu et j’ai informé de ma disponibilité pour tous projets de développement du pays, au bénéfice des gabonais » a déclaré Charles Mba lors de son entretien avec le Président de la République.
Si exprimer le désir de servir le pays aux côtés du pouvoir en place reste une ambition à priori noble, elle a toutefois de quoi surprendre, lorsqu’elle est portée et souhaitée par Charles Mba. Un homme politique qui, il y a quelques mois encore se répandait sur de nombreux plateaux de télévision, pour déverser sa bile contre régime avec lequel il se dit aujourd’hui prêt à travailler. « Je pense qu’Ali Bongo n’a absolument aucune légitimité » affirmait l’ancien ministre d’Omar Bongo dans une émission diffusée sur les antennes de TV5 monde, avant de préconiser la prise de mesures restrictives ciblées contre le Chef de l’Etat qu’il accusait d’avoir usurpé le pouvoir lors des présidentielles de 2016. « La terre entière sait que le vainqueur de l’élection présidentielle de 2016 est Jean Ping » poursuivait l’opposant lors de la même émission.
Au moment où Charles Mba annonce sa disponibilité à servir le pays avec le pouvoir de nombreuses questions surgissent. Qu’est ce qui justifie le virage à 360° de l’homme politique ? Quelles sont les raisons réelles qui se cachent derrière le rapprochement entre Charles Mba et le pouvoir en place ? L’ancien ministre d’Omar Bongo est-il animé par le désir de servir son pays ou celui de servir ses intérêts personnels ? Sinon qu’est ce qui peut expliquer l’incohérence et l’incohésion d’une telle démarche ? Si ce n’est cette volonté de certains acteurs politiques, de ne satisfaire uniquement que leurs intérêts bassement égoïstes, à travers la recherche de l’argent facile, manifestation de l’obscurantisme dans lequel est englué une partie de la classe politique.
Dans tous les cas, ce que d’aucuns appellent déjà le retour de Charles Mba dans la « maison du père » , va certainement accentuer la crise de confiance entre les populations et les politiciens. Des populations qui peinent à percevoir la cohérence politique et l’idéologie de leurs représentants, lesquels semblent finalement animés par le seul désir de satisfaire leurs intérêts personnels. Le tout, en violation du Contrat social porté par Jean Jacques Rousseau et Thomas Hobbes, deux philosophes qui considéraient que l’unique objectif des élus ou des représentants, est de servir l’intérêt général encore appelé volonté populaire.