Libreville, le 4 juillet 2022 (Dépêches 241). Joueurs transportés dans des embarcations de fortune ou contraints de dormir à la belle étoile, salaires impayés. Le National-foot saison 2022, lancé le 14 mai dernier à grand renfort médiatique, connaît depuis quelques jours ses premiers couacs. De quoi susciter des interrogations dans l’opinion publique.
« La Task-force du National-foot, s’inscrit dans une dynamique de relance du championnat national de football, en prenant en compte tous les aspects qui concourent à sa modernisation, à son efficacité et à sa pratique efficiente ». Les mots prononcés par Franck Nguema le 10 mai 2021, à l’occasion de la cérémonie solennelle d’ouverture des Assises du championnat national de football, sonnent plus que jamais comme des voeux pieux, au regard des graves incidents qui ont émaillé le championnat depuis sa reprise à grand renfort médiatique, le 14 mai dernier.
« Les mauvaises habitudes ont la peau dure » dit une maxime populaire. En effet, en dépit des belles promesses du gouvernement, les joueurs du stade Mandji ont été récemment contraints au péril de leurs vies, d’emprunter une pirogue de fortune, pour rallier la ville de Koulamoutou via Lambaréné, afin d’y affronter Bouenguidi Sport. De même, les joueurs de l’Union Sportive de Bitam, refusant de dormir dans un motel vétuste, qualifié de « boxon », ont passé la nuit à la belle étoile à Mouila, à la veille d’une rencontre pourtant décisive contre l’AS Dikaki. Pire, selon un communiqué de l’Association nationale des footballeurs professionnels du Gabon (ANFPG) « Aujourd’hui, 82 % des joueurs du National-foot n’ont perçu aucun salaire depuis le début du championnat » a-t-on pu lire dans la missive.
Des couacs qui ne sont pas sans rappeler, d’autres qui par le passé, ont été vertement dénoncés et ont même en partie justifié, l’organisation des Assises du championnat national de football inspirée par le président de la République, supervisée par le premier ministre et pilotée par le ministre des Sports. « Le diagnostic posé froidement sur le sport national en général et le football en particulier laisse apparaître des résultats peu reluisants ces dernières années, en dépit des moyens colossaux consentis par l’Etat. Ainsi la réforme du National football m’est apparue comme une évidence bien plus qu’une nécessité » avait d’ailleurs affirmé Franck Nguema, pour justifier l’intérêt d’organiser cette grande messe.
Des couacs, qui en définitive suscitent plusieurs interrogations. Comment est-il possible qu’après l’annonce par le ministre d’un championnat modernisé, des joueurs aient pu dormir à la belle étoile ? Pourquoi l’équipe du Stade Mandji a-t-elle été contrainte d’emprunter une pirogue de fortune au péril de la vie des joueurs, pour aller disputer un match du National-foot ? Comment justifier qu’à l’entame de la 2ème phase du championnat, 82 % des joueurs n’aient pas perçu leurs salaires ? Est ce là le championnat moderne tant vanté par les autorités en tête desquelles le ministre des Sports ?
Joint au téléphone par la rédaction de Dépêches 241, le service communication du ministère des Sports a dénié toute implication dans l’organisation du championnat et par conséquent dans toute l’actualité y afférente. Chose curieuse, quand on sait que la Ligue nationale de football professionnelle organise le championnat sous le contrôle du ministère qui met à disposition les financements. Par ailleurs, tout le monde a encore en mémoire les belles promesses du ministre Franck Nguema au terme des assises, lorsqu’il s’engageait à organiser un championnat moderne aux résultats efficients. Certains se rappellent aussi de sa sortie au soir de la qualification des Panthères à la Coupe d’Afrique au Cameroun face à la RDC. « Vous verrez ! Je vais vous organiser un bon et beau championnat » avait-il déclaré.
Sauf à se dédire ou à se vautrer dans le reniement de soi, la posture du ministère via son service communication est antinomique et foncièrement contradictoire. Car il est incongru pour le ministère des sports de prétendre être à la base de refondation du National Foot et dans le même temps, nier son implication dans l’organisation de celui-ci, parce que en proie à ses premiers couacs. Une posture qui s’apparente à une fuite en avant, un refus d’assumer ses responsabilités ou peut être à une volonté manifeste de ne pas communiquer.