Libreville le 18 juillet 2023 – (Dépêches 241). Le gouvernement, par le biais du conseil des ministres, a pris la décision de façon unilatérale de modifier la loi électorale en supprimant entre autres les enveloppes accolées. Pour justifier cette entourloupe juridique, le parti au pouvoir fait prospérer l’idée que cette réforme émane d’une volonté de l’opposition tout en se gardant de préciser que celle-ci était conditionnée par l’introduction du bulletin de vote unique.
Depuis plusieurs jours, les tensions politiques liées au processus électoral atteignent des sommets, non sans mettre en péril de manière presque certaine les promesses d’un scrutin aux lendemains apaisés tel que souhaité pour une partie de la classe politique gabonaise. Noeud gordien de cette pomme de la discorde, la loi portant modification et complétant certaines dispositions de la loi N°07/96 du 12 mars 1996 portant disposition à toutes les élections politiques.
Une loi jugée controversée et qualifiée de « scélérate » qui porte atteinte à l’intégrité du système électoral. Car celle-ci consacre notamment le retrait de l’enveloppe « accolée », mise en place en 2002 pour limiter les achats de vote. Selon le camp du pouvoir, cette réforme avait été souhaitée par l’opposition, laquelle l’avait d’ailleurs fermement matérialisée dans le Mémorandum intitulé « Plaidoyer des partis politiques de l’opposition pour une réforme du système électoral national » et signé par plusieurs d’entre eux.
Seulement, si l’opposition admet avec sincérité avoir milité pour le retrait de l’enveloppe accolée, elle précise que ce retrait était conditionné par l’introduction du bulletin unique. C’est tout cas ce que soutient Jean Gaspard Ntoutoume Ayi, le vice-président de l’Union Nationale. « Que le pouvoir et le CGE ne se limitent pas à donner des explications tronquées. Qu’ils précisent bien que le retrait des enveloppes accolées tel que souhaité par l’opposition était conditionnée par l’introduction du bulletin unique. Un bulletin avec tous les candidats et sur lequel il suffisait pour l’électeur de cocher la case du candidat de son choix », a-t-il indiqué.
Les déclarations de ce représentant de l’opposition semblent faire prospérer les suspicions de manœuvres orchestrées par le pouvoir, tendant à faire le lit à la fraude. Pourquoi avoir fait le choix de retirer uniquement les enveloppes accolées sans tenir compte de l’introduction du bulletin unique souhaitée par l’opposition dans son mémorandum? Pourquoi avoir fait de la rétention d’information en faisant prospérer dans l’opinion l’idée que l’opposition serait de mauvaise foi parce que reniant ses propositions ? Dans quels intérêts ? Pour quels buts ?
Si ces interrogations restent entières en même temps qu’elles mettent à nu les effluves de fourberie du parti au pouvoir, elles ont le mérite de situer les origines du caractère litigieux de cette loi. Une loi controversée dans sa lettre puis dans son esprit. Dans son esprit, d’une part, parce qu’elle est érigée en plein processus électoral. Dans sa lettre parce qu’elle modifie à la faveur d’une partie, les dispositions moyennant lesquelles toutes les parties (oppositions, société civile et parti au pouvoir) avaient décidé de s’engager d’autre part. Toute chose qui porte atteinte à la sincérité du scrutin et qui par ricochet met en péril l’idée d’une élection aux lendemains apaisés.