
Libreville, le 22 Mai 2025 – (Dépêches 241). Dans une déclaration d’une hauteur intellectuelle rare et d’une précision juridique qui en ferait pâlir d’envie tous les praticiens du droit, l’Union pour la Démocratie et l’Intégration Sociale (UDIS), par le biais d’un point de presse tenu hier à son siège, a donné et c’est peu de le dire , une leçon de droit et de procédure pénale à la justice gabonaise et plus précisément, au Procureur de la République et sa suite. Comment justifier le maintien des poursuites contre l’homme d’affaires sans preuve, ni délit encore moins de victime ? Comment expliquer l’application de l’article 163 du code de procédure pénale pour refuser un non lieu tout en ignorant sa jurisprudence ? Comment expliquer le contraste avec l’application de cette disposition dans le cas de Sylvia Bongo et son fils pour justifier leur sortie et utiliser le même argument pour rejeter le non-lieu de l’homme d’affaires ? Rédigée dans un style canonique d’une justesse inouïe, la déclaration du Parti politique d’Hervé Patrick Opiangah, dans une ironie hardie, a mis les magistrats en charge du dossier de leur leader devant le miroir déformant de leur propre incompétence, de leur compromission et de leurs incohérences, et pour d’aucuns de leur pusillanimité.
Nous publions in extenso ladite déclaration.
« Citoyennes et citoyens de l’UDIS,
Citoyennes et citoyens d’Afrique, d’Europe, d’Amérique, d’Asie, d’Océanie,
L’UDIS vous remercie pour votre soutien dans l’épreuve inédite, politico-juridique, que traverse notre formation politique en République gabonaise.
La mission de dire le droit a été confiée à l’État qui agit au nom du peuple. Ce peuple dont les 6500 salariés de HPO & ASSOCIÉS font partie, ce peuple dont Hervé Patrick OPIANGAH (HPO) et sa famille font partie, ce peuple dont les militants les sympathisants de l’UDIS font partie, ce peuple que les fils et filles – d’ici et d’ailleurs -, aiment, ce peuple vous regarde, vous qui incarnez la personne morale qui est l’État, vous, Monsieur le Président de la République gabonaise. Le peuple tourne son regard vers vous en tant que père de notre nation, une et indivisible, et en tant que garant des institutions.
En théorie, il y a le principe de la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire mais, dans la pratique, pour asseoir sa légitimité, la justice doit garantir son indépendance, son impartialité et le respect de l’égalité. Animée de ce vœu pieux, elle doit pouvoir le traduire en acte, afin que le palais de justice soit le reflet de la maturité judiciaire de tant d’illustres personnes qui y travaillent au nom de l’intérêt général. Or, les décisions que la justice gabonaise prend, dont la dernière en date, dans l’affaire du Citoyen Hervé Patrick OPIANGAH, laissent perplexe.
Alors, en tant que profane, l’UDIS s’interroge et interroge le droit.
1) D’après ce que nous savons, « le juge est indépendant dans sa mission de dire le droit vis-à-vis des autres pouvoirs et de tout tiers qui ne doivent ni pouvoir l’influencer ni lui faire subir de pression ». Hélas, « cette garantie ne s’applique pas aux magistrats du parquet placés sous l’autorité du garde des Sceaux qui peut leur donner des ordres ».
Et, dans le cadre de l’épineuse question de la nomination du Président de la Chambre d’accusation par le Conseil Supérieur de la Magistrature (article 178 alinéa 3 du Code de procédure pénale), un poids invisible repose sur les épaules et sur les dossiers du Président de la Chambre d’accusation.
Est-ce là que le bât blesse, dans notre cas ? L’UDIS s’interroge.
2) En ce qui concerne l’impartialité, « tout juge est tenu d’appliquer la règle de droit plutôt que de statuer en vertu de considérations étrangères au droit ». Des mécanismes de protection contre les risques de partialité existent tels que les possibilités d’abstention et de récusation.
En effet, d’après le dictionnaire de droit privé : « les magistrats qui, à l’occasion d’une affaire, pour des motifs qui leur sont personnels, craignent de se trouver influencer dans leur décision au regard d’une des parties, doivent, en dehors même de toute initiative prise par une d’elles ou par son avocat, prendre l’initiative de demander au Président de la Chambre à laquelle ils appartiennent ou au Président de leur juridiction, de désigner un autre magistrat pour participer aux débats et au délibéré ».
L’article 328 du Code de procédure civile gabonais prévoit cette situation sous la dénomination d’abstention”. On dit dans ce cas, que le juge “se déporte”. « Le juge qui suppose en sa personne une cause de récusation ou estime en conscience devoir s’abstenir se fait remplacer par un autre juge que désigne le président de la juridiction à laquelle il appartient » (alinéa 1 dudit article). “Lorsque l’abstention de plusieurs juges empêche la juridiction de se constituer, il est procédé comme en matière de renvoi pour cause de suspicion légitime” (alinéa 2).
De plus, l’article 526 du Code de procédure pénale gabonais énonce que « les dispositions du code de procédure civile relative à la récusation sont applicables devant les juridictions pénales » . Car la récusation permet “de mettre en exergue un conflit d’intérêt, biaisant l’impartialité d’un juge, empêchant ainsi ce dernier, de rendre justice au nom du peuple”.
Vous vous demandez pourquoi l’UDIS évoque une éventuelle influence extérieure qui mettrait à mal l’impartialité des juges dans cette affaire qui nous impacte économiquement, socialement et politiquement, depuis plus de 6 mois, n’est-ce pas ? Parce que, lorsque le Président de la Chambre d’accusation fonde sa décision sur l’article 163 du Code de procédure pénale, l’UDIS s’interroge sur les raisons qui motivent le rejet de la demande de non-lieu des avocats de Monsieur Opiangah.
Petit précis de droit, l’article 163 du Code de procédure pénale gabonais, en son premier alinéa : « Si le juge d’instruction estime que les faits ne constituent ni crime, ni délit, ni contravention ou si l’auteur est resté inconnu ou s’il n’existe aucune charge contre l’inculpé, il déclare par ordonnance qu’il n’y a pas lieu à poursuivre ». Quant à l’alinéa 4 du même article, il dispose que “des ordonnances de non-lieu partiel peuvent intervenir en cours d’information et au terme de celle-ci”.
Or, le Procureur général tentait d’évoquer le fait que « le non-lieu total n’intervient que lorsque le magistrat instructeur estime que l’instruction paraît terminé et qu’il n’y a plus lieu à poursuivre l’information contrairement au non-lieu partiel qui peut être ordonné selon l’alinéa 4 de l’article 163 » en cours d’information et au terme de celle-ci”.
Alors, la jurisprudence française vient éclairer notre lanterne et lever le voile sur cette ambiguïté : « Cour de cassation, Chambre criminelle, le 27 novembre 1963 : en effet le juge d’instruction avant de rendre une décision de non-lieu n’est pas tenu de procéder à l’inculpation ni même à l’audition de la personne visée dans l’acte de poursuite s’il lui apparaît, au vu des éléments de l’information et sans qu’il soit besoin de recevoir ses déclarations, que la culpabilité de cette personne se trouve d’ores et déjà exclu ».
Et c’est, nous l’espérons, dans cet esprit que le Procureur général reconnaissait qu’“un non-lieu s’impose au regard des dénégations de la prétendue victime, de l’inexistence de charges suffisantes contre Hervé Patrick OPIANGAH et des vices de procédure relatifs au qualité de la partie plaignante et la régularité du soit-transmis dont la plainte est datée postérieurement”. Mais pourquoi ne pas prononcer un non-lieu ?
L’UDIS s’interroge et poursuit ses recherches.
L’article 195 du Code de procédure pénale (alinéas 1 et 2) précise que :
« La chambre d’accusation examine s’il existe contre l’inculpé des charges suffisantes. Si elle estime que les faits ne constituent ni crime, ni délit, ni contravention ou si l’auteur est resté inconnu ou s’il n’existe pas de charges suffisantes, elle déclare qu’il n’y a lieu à suivre » .
Alors, sur quelle base légale le Président de la Chambre d’accusation s’appuie pour retourner le dossier au premier cabinet d’instruction pour la poursuite de l’information ?
3) En ce qui concerne l’égalité, « la loi doit être appliquée de manière identique vis-à-vis de tous les justiciables ».
Mais quand l’UDIS lit l’article publié par RFI le 16 mai 2025, après la libération et l’arrivée de la famille BONGO à Luanda, l’UDIS découvre que « le procureur de la République gabonaise a affirmé que Sylvia et Noureddin BONGO avaient été mis en liberté en attente d’un procès ». Le Procureur général, quant à lui, a déclaré que « le juge d’instruction a clos son dossier depuis le 28 avril dernier. Il reste juste à fixer la date du procès. Ils seront jugés en leur présence ou absence puisqu’ils ont des avocats ».
Pourtant, le Président de la Chambre d’accusation dit le contraire dans l’affaire OPIANGAH : « le susnommé n’a pu être entendu […], prononcer un non-lieu dans ces conditions serait prématuré […], il convient alors de confirmer le juge instructeur ».
Redéfinissons donc ce qu’est la responsabilité pénale. Elle est liée à l’idée de faute. En droit pénal, pour que la responsabilité soit établie, il faut que l’intéressé ait commis une faute (principe de culpabilité) et que cette faute puisse lui être imputée (principe d’imputabilité).
Dans ce dossier, il n’y a ni faute (ni viol) ni victime (la présumée victime a été placée en garde à vue pendant 5 jours pour obtenir un faux témoignage, elle a réfuté les faits allégués et porté plainte contre le diffamateur).
Il n’y a ni délit, ni victime, ni charge retenue contre Monsieur OPIANGAH. Par conséquent, comment justifier le maintien des poursuites contre Monsieur Hervé Patrick OPIANGAH ? L’UDIS s’interroge.
Enfin, l’article 3 du Code de procédure pénale gabonais nous enseigne que « toute personne est présumée innocente tant que sa culpabilité n’est pas établie ». Mais dans cette affaire, nous avons l’impression que la justice veut que Monsieur OPIANGAH soit coupable.
Quelle faute a commise Monsieur Hervé Patrick OPIANGAH ou plutôt quelle faute veut-on lui imputer lors d’une éventuelle audition et dans quel but puisqu’ils savent et nous savons que le dossier est vide ? L’UDIS s’interroge.
« Prenons garde de ne pas verser dans l’odieux qui est la porte de sortie du ridicule », disait un fin diplomate gabonais en 1997.
Souvenons-nous que la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen du 26 août 1789 est universelle et traduit « un idéal individualiste propre à chaque homme et chaque femme titulaire de droits naturels inhérents à sa personne dont la liberté, l’égalité, la propriété, la sûreté ».
Le Gabon est un pays de paix et, bien que l’UDIS s’interroge sur les agissements de la justice, l’UDIS « refuse de croire que la banque de la justice a fait faillite » comme le disait si bien Martin Luther King Junior.
Chers Citoyennes et Citoyens de l’UDIS,
Chers Citoyens du monde,
L’UDIS vous remercie de votre soutien et de votre attention »