Grogne sur les conditions de l’octroi des Bourses: du revers de la médaille des effluves du populisme ?

L’ancienne ministre d’Ali Bongo Ondimba a-t-elle sciemment floué le peuple dans l’affaire des bourses ? ©montageD241

Libreville, le 9 janvier 2023 – (Dépêches 241). Le 4 décembre dernier, sur les antennes de Gabon 24, contre toute attente, la ministre de l’Education nationale Camélia Ntoutoume Leclerc a informé l’opinion des nouvelles conditions d’octroi des bourses. Dorénavant, il faudra obtenir des moyennes de 11 puis 12 selon que l’on soit au 1er ou au second cycle. Une décision qui a très vite suscité le débat au sein de l’opinion et même des contestations dans la rue. 

L’injustice, l’absence de transparence, une communication empreinte de félonie et de fourberie, le mensonge et le populisme sont entre autres les maux qui ont miné et gangrené les 14 ans de règne du régime déposé par Brice Clotaire Oligui et ses hommes le 30 août dernier. 

Ces maux, ces gangrènes, les Gabonais ont espéré et souhaité qu’ils disparaissent avec l’avènement du Comité de transition pour la Restauration des Institutions (CTRI). Mais bon, visiblement, ainsi que l’a consacré un adage populaire, « les mauvaises habitudes ont manifestement la peau dure ». Le jeudi 4 janvier dernier, par le truchement de sa ministre de l’éducation nationale, le régime d’Oligui Nguema et par ricochet, le gouvernement Ndong Sima, ont pris une décision qui fait le lit à l’injustice, l’absence d’équité et à la consécration de l’aberration. 

La recherche de l’excellence, une raison foncièrement fallacieuse ? 

Cette aberration, c’est celle à laquelle s’est livrée en mondovision Camélia Ntoutoume Leclerc en annonçant les nouvelles conditions de l’octroi des bourses au motif supposé de la recherche d’une excellence dont les préalables sont absents. « Nous sommes dans une transition. La restauration des institutions nous amène aussi à prôner l’excellence. C’est ce que recherche le chef de l’État […] Pour le secondaire au premier cycle donc de la 6eme en 3eme, il faut avoir 12 de moyenne », a-t-elle déclaré. 

Un argument peu recevable et qui peine à convaincre au sein de l’opinion, laquelle depuis plusieurs jours, interpelle la ministre de l’Education nationale sur la nécessité, pour la cohésion sociale, de revenir sur cette mesure foncièrement impopulaire. Car, en réalité, on ne saurait prôner l’excellence au sein d’un système éducatif gangrené par les grèves, les effectifs pléthoriques, l’absence de salle de classe et l’absence de professeur. « Quelle excellence voulez-vous attendre d’un enfant qui n’a pas de prof de maths, de SVT ou de français de la 6e en 4e », s’insurge une internaute. En gros, sans s’être acquitté du préalable, le gouvernement veut prôner l’excellence sans avoir joué sa partition en mettant les apprenants dans les meilleures conditions d’apprentissage ou a minima, en améliorant, à tout le moins celles-ci. 

Il est d’ailleurs notoire, sauf à interpréter de façon perverse cette résolution, qu’au moment de l’annonce de cette mesure par le président de la Transition, à l’occasion de son discours de prestation de serment, ce dernier avait évoqué le retour de la bourse sous le prisme des conditions arrêtées de façon traditionnelle qui est celui de l’obtention d’une moyenne de 10 sur 20. « J’instruis déjà le futur gouvernement à réfléchir sans délai sur les mécanismes à mettre en place afin de (…) rétablir la bourse pour les élèves du secondaire », avait-il déclaré. Une annonce faite en septembre, donc en début d’année scolaire.

Comme sous Ali Bongo, entre transparence et vérité, le gouvernement fait le choix de la félonie  

Les enfants ont ainsi effectué la rentrée, avec l’intime conviction qu’un 10 de moyenne, leur donnait le droit d’avoir la bourse, acquis social exhumé par Brice Clotaire Oligui Nguema. Pourquoi avoir fait le choix d’édifier l’opinion sur les critères d’attribution des bourses après la fin du 1er semestre ? Cette modification des règles du jeu en plein match par le gouvernement et Camélia Ntoutoume Leclerc donne le sentiment d’une mesure populiste, peu mûrie et annoncée sans avoir pris la peine de jauger cette mesure sur le plan économique. Le gouvernement s’est-il rendu compte que cette mesure est économiquement irréalisable ? Les nouvelles conditions d’octroi de la bourse trahissent-elle en réalité  l’incapacité d’Oligui Nguema à tenir sa promesse annoncée dans son discours inaugural ? 

C’est en substance cette idée  que fait pertinemment remarquer Anges Kevin Nzigou. « Le président a annoncé à la face du monde que tous les élèves du secondaire auraient à nouveau la bourse. Si les finances publiques ne permettent plus d’honorer cette promesse, au lieu de faire intervenir un 12/20 pour en bénéficier, il suffit de faire de la bourse une mesure sociale car pour avoir 10 quand on a pas de quoi manger correctement est un exploit », s’est indigné le secrétaire général du PLC. Approche et déduction identique pour le sénateur et syndicaliste Fridolin Mve Messa. « Plafonner la moyenne à 12/20 pour avoir droit à la bourse participe plutôt à faire des économies qu’à encourager les élèves », a indiqué le Secrétaire général du syndicat de l’éducation nationale. 

À la lecture des faits, il n’est pas moins évident que le gouvernement Ndong Sima et Camélia Ntoutoume ont, semble t-il fait le choix intentionnel et lucide, d’habiller la vérité en faisant prospérer l’idée potentiellement fallacieuse d’une quête hypothétique de l’excellence au lieu d’avoir l’attitude républicaine qui commande d’être sincère avec le Peuple. 

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