
Libreville, le 02 juillet 2025 – (Dépêches 241). Ce mardi 1er juillet à Paris, l’ancien président gabonais Ali Bongo Ondimba a été entendu par deux juges d’instruction du pôle Crimes contre l’humanité du tribunal judiciaire, dans le cadre de la plainte qu’il a déposée en mai 2024. L’ex-chef de l’État, qui se considère comme victime, dénonce une « séquestration arbitraire » imposée par les nouvelles autorités gabonaises à la suite du coup d’État militaire du 30 août 2023. Sa famille accuse en outre le régime actuel d’actes de torture.
Ali Bongo, accompagné de son épouse Sylvia et de leur fils Noureddin, avait quitté le Gabon à la mi-mai pour l’Angola, après plusieurs mois d’assignation à résidence à Libreville. Entendu comme partie civile, il bénéficie donc d’un statut de plaignant dans cette procédure. Ses avocats, Mes François Zimeray, Pierre-Olivier Sur, Catalina de la Sota et Clara Gérard-Rodriguez, ont salué devant l’AFP le sérieux des magistrats français en charge du dossier.
Depuis janvier 2024, une information judiciaire a été ouverte contre X pour des faits présumés de torture, actes de barbarie, enlèvement et séquestration en bande organisée. Selon une source proche du dossier, les investigations sont en bonne voie et commencent à faire émerger des éléments concrets, avec des dates précises, des faits établis et des pistes sur d’éventuels responsables.
Ces accusations sont fermement démenties par le général Brice Clotaire Oligui Nguema, auteur du coup d’État et président de la transition d’alors, devenu officiellement président en avril 2025. Il avait affirmé en mars dernier qu’aucune torture n’avait été infligée à Ali Bongo ni à sa famille, et avait garanti que Sylvia Bongo et Noureddin Bongo Valentin, accusés de détournements de fonds publics, faux usage de faux, falsification de la signature du président de la république, haute trahison, trafic de drogue entre autres, bénéficieraient d’un procès équitable. À la surprise générale, ils ont été discrètement exfiltrés du pays, sans procès ni comptes à rendre.
Ali Bongo, visiblement affaibli physiquement depuis son accident vasculaire cérébral (AVC) survenu en octobre 2018, était arrivé au pouvoir en 2009, succédant à son père Omar Bongo Ondimba, au pouvoir pendant 42 ans. Ensemble, père et fils ont dirigé le Gabon pendant 55 ans, consolidant un système politique marqué par des accusations persistantes de corruption, de clientélisme et de mauvaise gouvernance. Réélu de justesse en 2016 dans un climat de tensions post-électorales, Ali Bongo avait vu son autorité fortement contestée au fil des années.
Au regard de ce qui précède, l’audition d’Ali Bongo à Paris ouvre une nouvelle séquence judiciaire à l’échelle internationale, autour d’une transition politique gabonaise encore sujette à controverses. En se constituant partie civile, l’ancien président entend redonner une voix à sa version des faits, dans un contexte où sa famille dénonce des traitements inhumains de la part du nouveau régime. Si la justice française poursuit ses investigations, cette affaire pourrait bien avoir des répercussions diplomatiques et politiques importantes, tant pour le pouvoir en place à Libreville que pour l’image du Gabon sur la scène internationale.