Gabon: face à Trump, Oligui Nguema présente un climat des affaires assaini…mais la réalité montre autre chose

À Washington, Oligui Nguema a fait la promotion d’un environnement des affaires assaini et transparent bien loin de la réalité du terrain © DR

Libreville, le 16 Juillet 2025 – (Dépêches 241). De passage à Washington, le président de la République, Brice Clotaire Oligui Nguéma a profité de sa rencontre avec le président américain Donald Trump pour afficher sa volonté d’améliorer le climat des affaires au Gabon. Il a évoqué des réformes en cours, un meilleur cadre réglementaire, et une ouverture accrue aux investisseurs étrangers, marchés passés par appels d’offres. Des propos rassurants, calibrés pour séduire des partenaires anglo-saxons. Mais sur le terrain, les signaux d’un assainissement réel restent invisibles avec une dette intérieure qui en dit long, et les pratiques anciennes persistent.

« Depuis notre libération, nous avons changé notre façon de faire du commerce. Nous sommes concentrés sur la transparence et les appels d’offres pour quiconque souhaite investir dans notre pays ». C’est en ces termes que le président de la République, Chef de l’Etat a, face à Trump à Washington, vendu le climat des affaires au Gabon. 

En réalité, les marchés publics continuent d’être attribués massivement de gré à gré, dans une opacité qui alimente les soupçons de favoritisme et d’inefficacité. Les règles du jeu ne sont ni stables, ni transparentes, et encore moins équitables. L’annonce de la réforme du code des marchés publics, répétée lors du dernier Gabon Economic Forum, n’a à ce jour débouché sur aucune modification concrète ni encadrement des pratiques dérogatoires. Pendant ce temps, les entreprises locales, surtout les PME, restent à l’écart des grands contrats et des grands projets. 

Le poids de la dette intérieure, toujours non apurée, reste un frein massif à la relance. Les fournisseurs de l’État accumulent les impayés, avec plus de 3279 milliards FCFA de dettes intérieures à fin juin 2025, dont une part importante est due à des prestataires nationaux. Ces retards de paiement asphyxient les entreprises, fragilisent la trésorerie des banques, et empêchent toute projection à moyen terme. Paradoxe cruel : l’État parle de croissance et d’attractivité, alors même qu’il ne paie pas ses factures. 

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Les grandes annonces sur la transformation économique sonnent creux tant que le secteur privé local est traité comme une variable d’ajustement. L’accès à la commande publique reste verrouillé. Le crédit bancaire est paralysé par les arriérés. L’informel devient la norme, et l’investissement productif recule, faute de confiance. Même les partenaires traditionnels du Gabon attendent des actes. Les investisseurs ne s’en tiennent plus aux discours. 

Le président peut bien séduire Washington par des promesses, mais tant que les PME locales croulent sous les impayés, que les marchés publics restent verrouillés entre initiés, et que la dette intérieure n’est pas sérieusement assainie, le climat des affaires au Gabon restera un mirage institutionnel. Les investisseurs observent surtout les délais de paiement, la prévisibilité fiscale, l’équité dans l’accès aux contrats publics, et surtout la transparence dans l’exécution budgétaire. Or, sur tous ces points, le Gabon accuse un retard chronique. 

La parole présidentielle, si elle n’est pas suivie de réformes effectives, alimente l’usure de la confiance. Le changement ne se proclame pas à l’international. Il se prouve sur le terrain, dans le quotidien des entrepreneurs, dans la rapidité d’un paiement, la clarté d’un appel d’offres, et la justice rendue sans délai ni connivence. Et c’est là tout le paradoxe de la transition en cours : elle communique abondamment à l’extérieur sur sa volonté de rupture, mais peine à instaurer une relation saine avec les acteurs économiques nationaux. 

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