
Libreville, le 29 septembre 2025-(Dépêches). Le transport d’électeurs d’une circonscription à une autre a atteint des proportions inédites lors du scrutin couplé législatif et local du 27 septembre dernier. À Ndendé, théâtre d’un duel sans merci entre Mays Mouissi et l’enfant du village Yves-Fernand Mamfoumbi dit Manf 10, la petite bourgade s’est soudain retrouvée saturée de bus et de taxis-bus, au point de ressembler à Libreville aux heures de pointe. Une scène surréaliste qui soulève une question légitime : lequel des deux candidats, celui de l’Union démocratique des bâtisseurs (UDB) ou celui du Parti démocratique gabonais (PDG), a le plus orchestré ce transport massif ?
Jamais, dans l’histoire électorale du Gabon, un tel déploiement de moyens n’avait été observé. Les deux protagonistes ont réussi l’exploit de transformer Ndendé, ville habituellement calme, réputée pour ses « neuf routes mystiques », en une capitale provisoire de l’embouteillage. Cet épisode, au-delà de l’anecdote, met en lumière le refus persistant de certains acteurs politiques de rompre avec les pratiques les plus décriées de l’ancien régime. Leur discours sur le changement apparaît dès lors comme une simple rhétorique destinée à manipuler l’opinion et à confisquer le pouvoir par tous les moyens.
Le scandale du transport des électeurs pose inévitablement la question de leur enrôlement. Car pour voter à Ndendé, il faut y être inscrit. Or, nombre de ces électeurs importés n’y résident pas, n’y exercent aucune activité économique, et n’y possèdent aucun lien familial, contrairement aux exigences de la loi. C’est une fraude organisée, qui dévoie le processus électoral et ridiculise les institutions censées en garantir l’intégrité.
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Ce scrutin fut aussi, pour les deux candidats, l’occasion de rivaliser dans l’art de détourner la loi. Qui de l’élève et du maître allait surclasser l’autre en matière de fraude électorale ? Les résultats apportent une réponse implicite. Cette pratique du transport massif a pour effet de gonfler artificiellement le corps électoral d’une circonscription, au détriment des véritables électeurs locaux. Conséquence : une fois élu, le vainqueur n’a plus d’attache avec la communauté, sachant que sa victoire ne dépend pas de ses habitants, mais des électeurs importés de Libreville et d’autres localités.
Selon plusieurs indiscrétions, près d’une cinquantaine de Coasters et une centaine de taxis-bus auraient quitté Libreville pour converger vers Ndendé. Comment une telle opération est-elle possible dans une Ve République qui prétend rompre avec les pires pratiques du passé ? Les autorités compétentes n’ont-elles pas le devoir de s’autosaisir face à une fraude aussi flagrante ? Tout laisse croire que ces manœuvres sont tolérées, voire encouragées, et que le peuple gabonais reste, une fois de plus, le dindon de la farce.
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Au final, les résultats provisoires du ministère de l’Intérieur donnent Mays Mouissi vainqueur avec plus de 2 000 voix d’écart face à Yves-Fernand Manfoumbi. Un triomphe qui, loin d’être une victoire éclatante de la démocratie, révèle plutôt la maîtrise de l’UDB dans l’art d’appliquer les méthodes du PDG et ce par un homme qui s’est toujours posé en contre-exemple du régime ancien. L’élève Mays Mouissi , à Ndendé, semble bel et bien avoir surclassé le maître, Yves Fernand Manfoumbi.







