Éviction d’Ali Bongo du pouvoir: Au nom de la raison d’Etat 

Le Président de la Transition, ici à Franceville, s’est étendu pendant plusieurs minutes en prenant appui sur la raison d’Etat pour justifier son coup de Libération ©ComPrésidentielle

Libreville, le 18 juillet 2024 – (Dépêches 241). Le Président de la Transition, Président de la République,  Chef de l’État, était à Franceville hier dans le cadre de sa tournée républicaine. Dans la province originaire du Président qu’il a déposé par les armes, Brice Clotaire Oligui Nguema s’est acquitté d’un devoir, d’une obligation essentielle et d’un impératif existentiel : celui de donner aux frères, pères, mères d’Ali Bongo Ondimba, les raisons pour lesquelles il a déchu leur fils du pouvoir au soir du 30 août 2024. 

Détendu, le visage calme et serein, la voix fluide et la diction presque parfaite, c’est un Brice Clotaire Oligui Nguema restauré, qui s’est présenté hier à l’esplanade de la place de l’Indépendance de Franceville devant les populations de la province du Haut-Ogooué. Loin de la prise de parole ratée de Tchibanga, empreinte de puérilisme, au relent de dérive autoritaire entre personnification et patrimonialisation du pouvoir, qui a du reste choqué l’opinion, l’ancien sécurocrate d’Ali Bongo a certainement tenu hier, depuis son investiture, son discours le plus rationnel, le plus conséquent et le plus raisonnable

La raison, inéluctablement, fût hier à Franceville, le fondement du message du Général-Président. Dans une province possédant toujours en son sein des poches de résistance Pro-Ali Bongo, dans un environnement gangréné par des inconditionnels du fils d’Omar, sur les terres de ses parents, Oligui Nguema bien conseillé pour le coup, s’est senti pénétré de l’obligation de s’expliquer à nouveau sur les mobiles de sa prise de pouvoir. 

La raison du Fratricide pour éviter l’infanticide 

Pour justifier le fratricide et pour ainsi se prémunir d’un éventuel infanticide en réponse à son crime de Lèse-Majesté, Brice Clotaire Oligui Nguema a devant les parents d’Ali Bongo Ondimba, fondé son discours sur la raison d’Etat. Ce principe d’action politique selon lequel l’intérêt ou la sauvegarde de l’Etat prime sur toutes les autres considérations, notamment les normes de l’organisation du pouvoir, y compris celles de la morale, du droit et même de la démocratie. 

Aussi, à l’image d’un enfant du village appelé au corps du garde pour s’expliquer sur les raisons du forfait contre son frère, Brice Clotaire Oligui Nguema va invoquer la raison d’Etat et battre en brèche toute analogie avec le crime version Abel et Caïn. « Ces 14 dernières années, la gouvernance de notre pays a suscité un réel motif d’inquiétude (…) et aurait pu entraîner notre pays vers les ténèbres. Dans ce contexte le coup de la libération du 30 août entrepris par le CTRI dans une démarche inclusive, était indispensable », a-t-il d’abord lâché. 

Le discours de la Méthode 

Cette situation de chaos vers laquelle s’avançait dangereusement le Gabon trouve son épilogue dans l’infortune connue par Ali Bongo Ondimba en Octobre 2018. Au corps de garde de Franceville, Oligui Nguema a invité les parents de son ancien patron à faire une réminiscence. « Souvenez-vous que votre fils,  frère et oncle pour certains, Ali Bongo Ondimba a eu un AVC en octobre 2018 à Riyad (…). Nous militaires l’avons toujours accompagné, jusqu’au jour où il passe la gestion du pays à son fils et à sa femme », a-t-il indiqué, puis de faire comprendre qu’après cet accident, Ali Bongo n’était plus le même.

L’anecdote sur son épouse, surnommée « la Grace Mugabe » du Gabon, en dit long sur l’impuissance et l’absence du fils de Joséphine Nkama dans la gestion au sommet de l’Etat. « Peu après la dépénalisation de l’homosexualité, moi-même et un notable du Sénat, nous nous sommes rendus chez Ali Bongo pour prendre des instructions (…). À notre arrivée c’était choquant, nous avions vu un chef qui se cachait derrière la porte, et qui laissait sa femme nous insulter », a-t-il revelé. 

À  Franceville, hier, Brice Clotaire Oligui Nguema a clairement réussi son exercice de communication en faisant le choix de faire appel au « bon sens » des parents d’Ali Bongo Ondimba, afin qu’ils ne le condamnent pas pour son geste. Leur faire comprendre que le bon sens, ce pouvoir de bien juger, que Réné Descartes appelle « la raison », est ce sur quoi se sont appuyés les militaires pour faire le coup d’Etat le 30 août dernier pour dégager leurs fils. Et pour leur faire comprendre qu’ils n’ont rien perdu, il s’est senti dans l’obligation de souligner que lui, Oligui Nguema reste également leur enfant. « Je suis votre fils, fils de la province (…) né de Mme Mpiga Alice », a-t-il rappelé. 

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*