
Libreville, le 9 Février 2025 – (Dépêches 241). Alors que les avocats du capitaine d’industrie Hervé Patrick Opiangah, poursuivi pour une affaire de moeurs supposée, sur la base d’un dossier vide et sans victime, ont formulé une demande de non-lieu auprès de la Doyenne des Juges d’Instruction, Bruno Obiang Mve procureur de la République, a fait le choix de rejeter ladite demande au motif absurde et incongru d’une non-présentation de l’homme d’affaires devant le juge d’instruction. Un argument qui ne tombe véritablement pas sous le sens au regard l’absence de preuve, d’aveux ou encore d’éléments matériels susceptibles de justifier le maintien des poursuites.
La justice gabonaise vient de s’engluer encore une fois dans les abîmes et les tréfonds du ridicule à travers le refus de la doyenne des juges d’instruction inspirée par le réquisitoire du procureur de la République, de déclarer un non-lieu dans l’affaire Hervé Patrick Opiangah. C’est en tout cas ce que nous avons appris d’une source autorisée, du reste magistrat assermenté.
Pour justifier cette aberration judiciaire, dans son réquisitoire aux fins de rejet de non-lieu en cours d’information adressé à la doyenne des Juges d’instruction Bouenetse Flore Nathalie, Bruno Obiang Mve procureur de la République près du tribunal de 1ere instance de Libreville, soutient que la fuite de l’homme politique Hervé Patrick Opiangah rend la procédure complexe en ce sens que la version des faits de l’intéressé n’est pas connue dans le dossier. Et qu’en raison de ce mobile superficiel et éthéré, il convient de rejeter la demande de non lieu formulée par les avocats de l’homme d’affaires.
Un réquisitoire aux fins de refus de Non-Lieu qui prend appui sur une raison lunaire et biscornue
Si les conseils du fondateur de la Holding HPO et Associés ont logiquement fait appel en saisissant la chambre d’accusation, qui on l’espère va se départir de la posture incohérente et aliénée du procureur et de la Doyenne des juges en lisant le droit avec rigueur, le refus de prononcer un non-lieu dans cette affaire est symptomatique de l’état de du système judiciaire gabonais. Une justice qui semble encore plus malade que sous le régime ancien. Une justice sans hauteur, sans noblesse et sans prestige.
Car, la réalité dans cette affaire est telle qu’il n’est pas besoin d’être un expert en droit pour constater la persistance des contorsions juridiques impensables dans le seul but de maintenir les chefs d’accusation qui pèsent sur Hervé Patrick Opiangah. Charges qui au demeurant doivent être levées sans condition comme le présente un magistrat qui a requis l’anonymat. « Dès l’instant où l’infraction n’est pas constituée et que la victime supposée n’a pas reconnu les faits allégués par la dénonciation, le juge doit rendre une ordonnance de non-lieu car il n’existe pas d’infractions sans activité matérielle », indique-t-il.
Absence de preuve et application du principe « in dubio pro reo » ?
Le magistrat de poursuivre en précisant qu’en plus de l’absence d’élément matériel, Hervé Patrick Opiangah dont la preuve de ses actes supposés n’ont pas été apportée par le parquet doit bénéficier du doute que lui confère cette situation. « Dans cette affaire, les faits ne constituent ni un crime, ni un délit parce qu’ils n’existent pas, ou du moins, ils n’ont en tout cas jamais été prouvés et en l’absence de démonstration probante par l’accusation de sa culpabilité, le doute devra nécessairement profiter à l’accusé. C’est un principe élémentaire en droit pénal », ajoute-t-il.
Cette théorie juridique soulevée par l’homme en toge rappelle les conséquences sur la charge de la preuve de l’application du principe « in dubio pro reo » qui signifie « dans le doute abstiens-toi » et selon lequel le doute, justement, profite toujours à l’accusé. En vertu de la présomption d’innocence, l’administration de la preuve, en matière pénale, suppose classiquement que la partie poursuivante apporte des éléments décisifs afin d’évincer le doute. La présomption d’innocence a ainsi pour fonction de protéger les individus contre les risques d’arbitraire et de lutter contre le déséquilibre dans le rapport de forces. Ce principe du doute qui profite à l’accusé a été rappelé par la Cour Européenne des Droits de l’Homme (CEDH) dans l’affaire du 28 juin 2022, Boutaffala c/Belgique, n° 20762/19.
Quelle posture pour la Chambre d’accusation saisie par les Conseils de HPO ?
L’arbitraire et l’injustice semblent gouverner dans le dossier Hervé Patrick Opiangah contre un système judiciaire qui se refuse de lire le droit nonobstant l’absence de preuve, l’absence de victime, l’impossibilité de constituer l’infraction pénale visée et l’absence d’aveu, préférant s’accrocher à une insignifiante raison de version des faits qui n’a aucun intérêt à être donnée dès lors que la victime prétendue a rejeté en bloc toutes les accusations.
À charge désormais pour la chambre d’accusation à qui le dossier a été transféré de s’illustrer positivement en refusant « d’être les complices d’une justice instrumentalisée » qui ferme les yeux sur l’évidence d’un non-lieu et fait le choix de tourner en dérision une corporation qui appelle à son indépendance et à son émancipation dans un contexte de Restauration des Institutions qui semble galvaudée par les tenants du pouvoir.